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Décrypter le suicide dans la société algérienne: Le ravageur silencieux

Le suicide est un phénomène qui touche les quatre coins de la planète, depuis la nuit des temps. L’homme tente, sans cesse, de le comprendre, et de l’étudier pour proposer des solutions salvatrices. En Algérie, on dénombre beaucoup de suicides, lesquels sont en croissance démesurée. Cependant, les pouvoirs publics tardent à se consacrer, sérieusement, à cette tragédie dévastatrice. Dans ce dossier nous décryptons un « les départs sans retours », en se focalisant sur des lectures psychologiques fournies par des spécialités du domaine. 

Le suicide ne cesse de faire couler l’encre et d’être l’objet de recherches et d’études universitaires, un peu partout dans le monde. C’est aussi un centre d’intérêt majeur de nombre d’associations, idem pour les stratégies politiques.  Des sommes faramineuses sont déboursées dans ce sens. En France, au Canada, en Suisse, en Italie, aux USA et ailleurs, personne n’échappe aux multiples quêtes  scientifiques. Des centres spécialisés ont vu le jour dans nombre de pays, non seulement pour comprendre ce phénomène, mais surtout pour le freiner, le stopper un tant soit peu. Sans omettre de citer les structures de rééducations permettant aux gens ayant tenté de mettre fin à leur jours de se « soigner », de rebrousser chemin et de tourner le dos à la tentation du néant. En plus des centres de désintoxication et d’insertion sociale, la prise en charge psychosociale des personnes vulnérables est de mise. Cependant, cela ne veut pas dire que les choses marchent harmonieusement comme dans un beau rêve. Malgré ces efforts considérables le suicide et les autres fléaux  sociaux continent de faire des ravages devant la passivité des uns et la complicité des autres. Donc, le monde occidental n’est pas aussi parfait qu’on le croit.  Le suicide ne date pas d’aujourd’hui. En effet, c’est l’une des plus anciennes « pratiques » qu’a connu l’être humain. L’histoire antique, la littérature universelle et bien d’autres sources nous renseignent sur les incommensurables suicides. Même les personnes dites « normales » n’échappent pas à cette faucheuse. Parfois, même notre entourage ignore nos souffrances profondes, surtout dans des sociétés où la communication est souvent reléguée aux oubliettes. Alors on ne devine le mal qui ne ronge qu’après un irrémédiable voyage. De part le monde, des  personnalités connues, des intellectuels, des politiques, des hommes d’affaires, des femmes célèbres et même des psychanalystes sont sur la longue liste noire. Les pays qui enregistrent le plus haut taux de suicide sont les pays nordique tels que la Norvège et la Suède. Ce qui nous laisse supposer que le suicide n’est pas seulement provoqué par la misère et la « survie » mais aussi par d’autres facteurs plus complexes. Ainsi une lecture simpliste du phénomène serait vaine et insignifiante. Malgré les explications scientifiques, le suicide demeurera une énigme à laquelle l’homme ne pourra pas apporter toutes les réponses et explications car, les chercheurs se perdent, souvent, dans le labyrinthe de la personne humaine. Et puis le suicidé n’est pas là pour nous fournir des éléments-clefs. Certaines personnes vous diront qu’on va se contenter d’étudier les tentatives de suicides. Toutefois les spécialistes de la santé mentale pensent que la majorité des tentatives de suicides sans succès ne sont, en réalité, que des signes d’alarmes. Donc chez ses sujets, le but n’est pas de se donner la mort mais d’exprimer un grand malaise et d’alerter ses proches.

Le suicide en Algérie, un mal sans nom ni prénom

    En 1939, Albert Camus écrit, dans ses fameux reportages sur la Misère de la Kabylie (dans Alger-Républicain) « Ici la misère est effroyable. Si ce n’était pas ridicule, il faudrait le crier tous les jours dans le journal. Je ne suis pas suspect de sentimentalité. Mais aucun homme de sensibilité moyenne ne peut voir ce que j’ai vu sans être bouleversé ». Nous pensons qu’on peut écrire la même chose sur le suicide dans l’Algérie actuelle, sans aucune dramatisation ni exagération. Beaucoup de gens se suicident et à peine si on les cite dans la presse et hop place à l’amnésie. Certains quotidiens recommandent même à leur journalistes et correspondants de ne pas écrire sur cette « banalité », tellement elle se répète fréquemment. Nous avons eu nous même « l’amère opportunité » d’être témoins de ce silence-radio imposé. Selon les statistiques officiels de la gendarmerie national de ces dernières années, le nombre des suicide annuels est dépassent les 300 cas, idem pour les tentatives de suicides. En d’autres termes, presque chaque 24 heures, y a un suicide et une tentative de suicide à l’échelle nationale.  Et ce sans comptabiliser les « suicides cachés » pour des considérations familiales ou sociales  car ce phénomène demeure un grand tabou. Il y a, en outre, les suicides camouflés par des présumés assassinats, noyades et autres formes obscures. Donc, le nombre réel des personnes qui se donnent la mort dépassent largement les chiffres fournis par les services de sécurité et par la presse. Les conditions sociales lamentables que subissent de plein fouet les couches défavorisées sont, entre autres, des sources qui apportent des grains au moulin de la mort. Face à cette réalité lugubre et malgré de louables initiatives des pouvoirs publics, le mal reste omniprésent et croissant.  Les universités algériennes forment beaucoup de spécialistes de la santé mentale comme elles forment d’innombrables sociologues et autres cadres. Cependant, leur savoir n’est pas salvateur pour des citoyens faute de recrutement ou de politiques adéquates. Dans certaines wilayas, lesquelles enregistrent des taux de suicide alarmants, on ne recrute que 4 à 5 psychologues, annuellement, pour des régions ayant plus d’un million d’habitants. C’est inadmissible.  Pour les gens qui tentent de se suicider, souvent, on les livre à eux-mêmes, sans les prendre en charge, dans la plupart des cas, surtout dans les petits patelins, loin des « luxes citadins ».  Face à ces constatations, la société gagnerait à ne pas diaboliser le suicide et faire tout pour éviter toute dérive irréparable, en ouvrant plus d’espaces au dialogue, à la tolérance, à l’amour et toutes les valeurs nobles. Les autorités et les médias ont aussi un grand rôle à jouer pour informer, sensibiliser, prévoir et pourquoi pas, éviter le plus grand nombre possible de suicides. L’intelligence de l’homme lui permet de ne pas se laisser faire devant la rude réalité mais de proposer, sans cesse, des solutions ingénieuses. 

Les suicides s’invitent même dans les villages

Autrefois, les suicides ne marquaient qu’une présence timide dans les villages et les petits patelins. Cependant, ces derniers temps la règle n’est plus de mise. La « faucheuse » est omniprésente partout et durant toute l’année, même si la courbe atteint son paroxysme après la fin des examens et durant l’été. Désormais, le suicide prend des proportions importante  et devient un phénomène de société même si on loin des chiffres effrayants enregistré dans les Pays-Bas ou autres pays où le suicide et très banalisé.

L’immolation par le feu, la nouvelle forme de suicide

Après le suicide de Bouzizi, le fameux universitaire qui s’est immolé par le feu déclenchant la révolution tunisienne et inspirant d’autres pays, cette nouvelle forme de se donner la mort et devenu très fréquente chez nous.  Surtout après le 14 janvier 2011, date de la chute du Président tunisien Zine-El-Abodine Ben Ali. En effet, plusieurs cas ont été enregistrés un peu partout en Algérie. Malheureusement nombre d’entre eux sont morts suite à leur graves blessures. Se suicider par le feu est aussi une expression politique, un drame à prendre au sérieux, à décrypter à éviter, bien évidement.

L’individualisme et le manque de spiritualité

L’Algérie d’aujourd’hui n’est pas à l’écart des mutations que connaît le monde moderne. Si on reproche aux sociétés occidentales d’être très individualistes et de s’éloigner davantage de la spiritualité, notre pays aussi n’échappe pas à ces règles. L’Algérien commence à s’individualiser, fuyant petit à petit l’harmonie de la famille, de l’entourage. Ce qui le place dans une solitude fatale pouvant l’amener, dans certains cas au suicide. Une constatation confirmée par  des psychologues et des sociologues. De leur part, les hommes de religion, surtout les imams, estiment que le manque de spiritualité pousse les gens à faible personnalité au suicide. Selon eux « Seul l’amour et l’adoration du bon Dieu peut nous procurer la grande force pour faire face à l’absurdité de la vie. Et si les suicides sont en croissance, c’est que les nouvelles générations s’éloignent de plus en plus de la religion, laquelle donne un sens sublime à la vie ». 

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