Plusieurs indices, des plus clairs au plus sournois, plaident en faveur d’un inquiétant retour à la case du départ au Mali. La « case départ » signifie dans cette strate de la géopolitique une volonté de faire péricliter tous les efforts de paix entamés depuis des années, et réactivés de manière sérieuse ces dernières semaines.
L’événement. L’assassinat de Sidi Brahil Ould Sidat
Sidi Brahim Ould Sidat, un des principaux chefs de l’Azawad, est mort mardi, après avoir été transporté d’urgence à la clinique Golden life de Badalabougou, à Bamako. Il avait été la cible de tirs devant son domicile. En 2015, il avait signé à Alger l’accord de paix avec le gouvernement malien.
Sidi Brahim Ould Sidat avait signé au nom de la CMA un accord de paix à Alger en 2015 avec le gouvernement malien et une coalition de groupes armés, la Plateforme, pour restaurer la paix au Mali. L’application de cet accord est considérée comme capitale pour sortir le pays de la crise dans laquelle il s’enfonce, mais se fait toujours attendre.
Le chef du gouvernement de transition a exprimé sa « stupeur » devant un « acte abominable » perpétré alors qu’il devait le recevoir le jour même pour des discussions sur les réformes a conduire. Ould Sidat « fut un acteur important du processus de paix », a dit le Premier ministre qui a promis une enquête pour identifier et juger les coupables. Le représentant de l’ONU au Mali, Mahamat Saleh Annadif, en fin de mission, s’est dit « outré ». Il a rendu hommage sur les réseaux sociaux à un «de ces Maliens qui croient et œuvrent réellement pour la paix et l’unité du Mali ».
Les indices
1°La tête d’Iyad Ag Agali mise à prix
Des tracts ont circulé ces derniers jours au Nord-Mali, dans les zones sous protection des casques bleus et de la Force militaire française Barkhane. Nos sources à Gao et Tombouctou sont formelles : « Au même moment où des groupes djihadistes appelaient via les réseaux sociaux, les populations proches du camp mixte de l’armée malienne et de la Minusma d’Aguelhoc de quitter les lieux, des tracts étaient distribuées ou placardés avec la photo de Iyad Ag Ghali et une prime de à celui qui le tuerait (voir « confidentiel » p.2). Or tout le monde sait que celui qui est présenté faussement comme le plus grand terroriste de la terre a émis son souhait de faire aboutir la négociation politique engagée avec lui par Bamako via des intermédiaires. L’ennemi public n°1 était, rappelons-le, un diplomate malien en Arabie Saoudite, donc une personnalité éminemment politique, et par voie de conséquence « négociable ». La France, au mépris du souhait du peuple malien, rejette cette négociation politique et veut sa mort. « Ici et maintenant ». Mondafrique avait, de ce fait raison de titrer un article « Macron veut la tête de Iyad Ghali.
2°Les Accords d’Alger remis en question.
La presse française ajoutait foi aux propos de l’Elysée concernant le maintien des troupes sur place, stigmatisant au passage les « accords d’Alger ». Lisez ce titre, clairement affiché sur « Le Point » : « Mali : l’accord d’Alger aggrave-t-il l’insécurité au Sahel ? »
Et de préciser : « Les questions ne manquent pas sur l’impact de l’accord d’Alger sur le Mali, qui a du mal à être applique dans son intégralité. Et de s’appuyer sur un obligé de Macron, Issoufou. « Pour Mahamadou Issoufou, le doute n’est pas permis, la mise en œuvre de l’accord déstabilise la région : « Kidal est une menace pour la sécurité intérieure du Niger. » Il ajoute : « Il y a des mouvements signataires des accords de paix d’Alger qui sont de connivence avec les terroristes. Nous ne pouvons l’admettre ».
Un article un peu dans la veine de celui publié par « Le Monde », il y a deux ans : « Pourquoi l’Algérie protège le pire jihadiste du Sahel ? »
3°Maintien des troupes françaises et américaines sur place
L’Elysée s’est dit soulagé que Washington ait révisé la décision prise par Trump de faire rentrer les troupes américaines dans le monde à la maison. Barkhane passe par la période la plus « noire » de sa présence au Nord-Mali, après les bévues qui ont entrainé mort d’hommes et de civils. Pis encore, les populations du Nord-Mali ont exprimé leur souhait de voir les Français partir au plus vite.
Macron, qui souhaitait réduire ses effectifs après les échecs répétitifs, dit soudainement vouloir maintenir ses armées sur place, coordonner avec les Américains, et pousser d’autres pays d’Europe à s’engager dans le mécanisme de guerre dit « Tabuka ».
4° Importante saisie d’armes dans la région d’Agadez, au Niger
Deux véhicules ayant quitté la Libye en direction du Niger, ont été interceptés par des éléments de forces de sécurité en poste à Ingall, lors d’une patrouille dimanche dernier. Les trafiquants ayant refusé d’obtempérer, une course poursuite s’est engagée et l’un des véhicules s’est renversé non loin du village d’Aborack. 4 des 6 occupants blessés ont été trouvés sur place tandis que les 2 autres ont pris la fuite. Un ratissage a permis de découvrir le deuxième véhicule abandonné par les occupants avec sa cargaison.
L’opération a notamment permis de mettre la main sur 4 personnes (mises aux arrêts), 2 véhicules avec à leur bord un RPG7 et 2 roquettes, des pistolets, plusieurs cartouches et près de 200 litres d’essence.
5°Frémissements parmi les signataires de l’accord de paix.
Il y a quelques jours, Hamata Ag Hantafaye nous faisait part de sa crainte de voir des signataires de l’accord faire machine arrière. DE même, le CIAT disait ‘’niet’’ aux actes de séparatisme en violation de l’accord de paix d’Alger. Engagé pour la paix et de la réconciliation dans le septentrion malien, le Collectif intégrateur des Imouchagh et alliés de Tombouctou- CIAT mettait en garde toutes tentatives visant à nuire les efforts des autorités du Mali.
Dans déclaration faite lundi dernier, et dont « L’Express » détient une copie, le Collectif intégrateur des Imouchagh et alliés de Tombouctou- CIAT constate avec amertume et consternation des publications sous forme des vidéos tournées à Diré et relatives au séparatisme en violation de l’Accord de paix d’Alger. Avec la dernière rigueur, il condamne ces publications consignées dans des vidéos perpétuées et disséminées à dessein par des jeunes de Diré n’ayant aucune émanation, ni mandat d’aucune composante des dites populations. Le CIAT met en garde contre toutes les invectives, tendant à la division et rassure qu’aucune exhibition de telles publications ne doit aucunement remettre en cause les valeurs républicaines issues de la diversité sociale du cercle de Diré.
Le Collectif intégrateur des Imouchagh et alliés de Tombouctou regroupe 116 élus municipaux issus de 212 villages et fractions de 22 communes de la Région sur l’étendue de 5 cercles de la Région dont Diré. En cette qualité, il a invité le gouvernement du Mali, ainsi que les mouvements signataires de l’accord d’Alger à ne ménager aucun effort pour recoudre le tissu social et mettre en œuvre scrupuleusement les engagements réciproques pour le bienêtre des populations qu’il représente.