Le ministre des Affaires étrangères et de la Communauté nationale à l’étranger, Ramtane Lamamra, s’est à nouveau exprimé sur la crise diplomatique entre l’Algérie et la France. Dans un entretien accordé à la chaîne « Russia Today arabic » (RT) diffusée samedi 23 octobre 2021, le MAE algérien a indiqué qu’il y a eu beaucoup de déclarations à propos de cette crise en France.
« L’Algérie ne pratique pas la diplomatie du haut-parleur, travaille dans le calme, exploite les canaux diplomatiques ouverts et enregistre ses positions en toute transparence et en toute clarté lorsqu’il s’agit de questions touchant à sa souveraineté nationale et à ses intérêts suprêmes », a déclaré le chef de la diplomatie algérienne, lors de l’émission « Newsmaker » de la chaîne russe. Lamamra a rappelé que la crise diplomatique avec la France a commencé après « des déclarations incompréhensibles et inacceptables faites en haut lieu » en France « sans qu’un contexte raisonnable les justifie ».
« Il s’agit d’une agression verbale sur la souveraineté de l’Algérie. On a parlé de l’Histoire de l’Algérie, du système de gouvernance en Algérie, de questions de souveraineté. Nous n’acceptons aucune ingérence dans nos affaires intérieures de quelque part que ce soit surtout lorsqu’il s’agit des autorités de l’ex-Etat colonisateur », a-t-il dit, en ajoutant : « L’Algérie a mis les points sur les i, a pris des mesures concrètes pour exprimer son mécontentement, a convoqué l’ambassadeur d’Algérie pour consultation. Et l’ambassadeur (à Paris) est toujours à Alger ». M. Lamamra a également parlé de la fermeture de l’espace aérien aux avions militaires français participant à l’opération Barkhane au Mali.
Relations avec la Russie
En ce qui concerne une éventuelle présence militaire russe au Mali, notamment à travers la société privée Wagner, le MAE a algérien a expliqué que l’Algérie n’a pas d’informations précises sur cette question. « A partir de notre position favorable à la non ingérence, nous ne souhaitons pas une présence étrangère dans les pays africains indépendants. Nous voulons un continent sans aucune présence militaire étrangère », a-t-il déclaré.
Interrogé sur les relations entre l’Algérie et la Russie, Ramtane Lamamra a indiqué que les deux pays entretiennent des relations historiques et anciennes, les deux pays ayant signé une Déclaration de partenariat stratégique en 2006. « L’Algérie consulte d’une manière concrète et sérieuse la Russie sur certains dossiers sensibles présentés devant le Conseil de sécurité de l’ONU ou sur certaines questions touchant aux intérêts de la Russie dans des foras internationaux où l’Algérie est présente », a-t-il indiqué, en ajoutant qu’Alger et Moscou doivent développer les mécanismes mixtes de concertation compte tenu des nombreux défis qui se posent à l’échelle internationale pour « parfois prendre des positions communes sur certaines questions ».
Au sujet des relations avec le Mali, Ramtane Lamamra a déclaré : « Tout ce qui touche à la sécurité, à la stabilité et aux intérêts du Mali touche l’Algérie ». « Toutes les parties armées ou politiques écoutaient les conseils de l’Algérie lors de nombreuses et précédentes actions de médiation », a-t-il indiqué, en expliquant qu’après la détérioration récente des relations diplomatiques entre le Mali et la France, l’Algérie a pris soin d’écouter les reproches faits par les autorités maliennes à la France.
« Et nous savons que des manifestations ont été organisées au Mali pour dénoncer le comportement des forces militaires françaises déployées au Mali. Il y a des reproches faits par le Mali à l’Etat français et à l’armée française et il y a eu des déclarations officielles françaises contre l’Etat malien que nous considérons en Algérie comme une ingérence dans les affaires intérieures du Mali. Nous ne tolérons pas de tels comportements », a déclaré le MAE algérien qui a ajouté : « Nous étions dans l’obligation d’exprimer notre solidarité au peuple et à l’Etat maliens dans ce contexte ».
« Rabat est allé loin »
Le chef de la diplomatie algérienne a également évoqué les relations avec le Maroc, qui ont été rompues en août dernier suite aux « actes hostiles » du pays voisin. Lamamra a indiqué que « Rabat est allé loin, très loin dans ses attaques et ses manigances contre l’Algérie ». M. Lamamra a indiqué que le Maroc a « utilisé un certain nombre d’individus et d’entités qui ont été à juste titre classées en Algérie comme terroristes », d’opter « pour ce qu’on appelle les guerres de quatrième génération pour attenter à la stabilité de l’Algérie de l’intérieur » et de recourir à l’aide d’Israël.
Le ministre tient à préciser que l’Algérie « ne critique aucun pays lorsqu’il exerce sa souveraineté. Or, face à cet acte dirigé contre la sécurité et la stabilité de l’Algérie, nous avions appelé l’attention de tous sur la dangerosité et le caractère inadmissible de l’action entreprise par Rabat ».
« Lorsqu’on explique au Maroc par la voix de ministres, aux invités, notamment israéliens que l’Algérie est source d’inquiétude dans la région et qu’elle s’est alliée à un autre pays (…), l’Algérie s’est trouvée dans l’obligation de riposter vigoureusement », a expliqué M. Lamamra en référence à la décision d’Alger de rompre ses relations diplomatiques avec Rabat.
Alors que « l’Algérie a été de tout temps un facteur de stabilité et de paix dans la région, comme tout le monde le sait, la partie marocaine fait ressortir délibérément des déclarations fallacieuses sur la politique de l’Algérie et ses actions dans la région » déplore-t-il.
Le chef de la diplomatie algérienne affirme, par ailleurs, que « le Maroc est responsable de l’instabilité dans la région, désormais ouverte sur l’inconnu, du fait de son occupation du Sahara occidental », son refus du plan de paix des Nations Unies, et ses entraves à la solution au conflit » qui oppose le Maroc au Front Polisario.
« Toutes les démarches entreprises jusqu’à présent par le gouvernement marocain visent à imposer un fait accompli incompatible avec le droit international et ne remplissant pas les conditions minimales d’une coexistence pacifique entre les pays de la région, entendre par là, le peuple sahraoui frère qui a des droits inaliénables », explique le ministre. Il rappelle, à ce titre, la position l’Algérie vis-à-vis du conflit au Sahara occidental qui soutient le droit du peuple sahraoui à l’autodétermination.
Relations avec l’Iran
Interrogé sur les déclarations d’un ministre israélien au sujet d’une « relation spéciale » qu’entretiendrait l’Algérie avec l’Iran, Lamamra dira qu’il s’agit de « propos inexacts et incorrectes, car c’est là des déclarations relayées délibérément par le Maroc pour nuire à l’Algérie », ajoutant que « les choses sont claires et connues. L’Algérie entretient des relations normales et anciennes avec la République islamique d’Iran depuis le régime du Shah d’Iran ».
« L’Algérie et l’Iran ont des intérêts au sein de l’OPEP, et « l’Algérie a des intérêts à ce que l’Iran entretienne des bonnes relations avec tous ses voisins arabes, et que tout le monde dans cette région et dans d’autres, y compris celle du Maghreb, se conforme aux règles du droit international, sans aucune ingérence dans les affaires internes des pays, précise le ministre.