L’un des gouffres béants en Algérie où l’on jette sans compter l’argent public c’est bien celui des réévaluations des projets. Connaissant à fond les rouages administratifs, les failles contenus dans les dispositifs juridiques et les miracles qu’accomplissent les pots-de-vin, de nombreux entrepreneurs s’engagent à n’importe quel prix dans n’importe quel projet et arrivent sans coup férir à doubler ou à tripler le coût du projet parfois même avant le lancement des travaux d’exécution.
Partout, même dans les plus petites communes, on se prête à cet « exercice » de réévaluation avec une légèreté époustouflante. Des grands chantiers de construction d’axes routiers, de logements… aux petits chantiers de réalisation d’un stade de proximité ou d’un centre de santé tout est sujet à des réévaluations comme si ces projets sont lancés sans étude préalable.
Aucun secteur d’activité n’est épargné par cette « boulimie réévaluatrice ». Les secteurs de l’agriculture, de l’énergie, des travaux public….ont tous vus dans leurs derniers exercices bon nombre de leur projets réévalués.
Et de quelle façon ! Les chiffres hallucinants divulgués dernièrement à ce sujet par la cour des comptes montrent l’étendue des dégâts occasionnés par ces réévaluations. L’exemple du projet de transfert d’eau du barrage Malague à El-Tarf, Tébessa et Souk Ahras qui a été réévalué de 9,700 Mds de DA à 97 Mds de DA, soit un taux de 900% est largement édifiant. Comment peut-on espérer venir à bout du sous-développement, construire un pays fort, améliorer les conditions de vie des citoyens et préparer un avenir meilleur pour les futures générations avec une telle gouvernance ? Depuis des années on nous explique que les raisons des réévaluations des budgets sont liées principalement aux augmentations des prix des matières premières sur les marchés mondiaux et à l’immaturation les études. Soit ! Même si ces arguments ne convainquent pas grand monde puisque tout le monde sait que les vraies raisons de ces réévaluations ont pour noms corruption et incompétence, pourquoi alors ne pas y remédier ? Comment expliquer qu’en 2010 on avançait ces arguments pour justifier les réévaluations qui avaient touché alors bon nombre de projets et qu’ont vient encore dix ans plus tard avancer les mêmes justificatifs ?
C’est irrecevable ! Cette indue saignée du trésor public doit cesser et les responsables à tous les niveaux impliqués dans ces « réévaluations » doivent dorénavant rendre des comptes. Car si on continue à tolérer cette façon de gérer on peut gager que l’Algérie fera encore et encore du surplace. Il faut vite améliorer l’efficacité de l’utilisation de la ressource financière publique et faire en sorte que le triptyque « Qualité-Coût-Délai » préside enfin la gestion des projets publics.