Le jeudi 28 janvier 1999, Rouiched, le grand humoriste algérien de la deuxième moitié du XXe siècle, s’éteignait à l’âge de 78 ans des suites d’une longue maladie. Il fut inhumé au cimetière d’El Kattar, sur les hauteurs d’Alger.
De parents originaires de l’ex-Port-Gueydon, sur le littoral de la Kabylie du Djurdjura, Ahmed Ayad naquit le 20 avril de l’année 1921, dans le quartier le plus ancien de la capitale. Il fréquenta l’école de Soustara, dans la Haute Casbah, mais se vit contraint de mettre un terme à ses études, à l’orée de son adolescence pour aller à la rescousse de ses parents qui avaient tant besoin de son aide en cette période de disette précédant la seconde guerre mondiale.
Pour assurer la subsistance de sa famille, Ahmed Ayad s’attela successivement à moult petites métiers : cireur, vendeur de journaux à la criée, vendeur à l’étalage… Jeunot qu’il était, il ne se gardait point de joindre du «guignol» à l’œuvre. Et, comme le hasard fait bien les choses, comme on dit, un homme de théâtre, en la personne de Mahboub Stambouli, voyant en se garçonnet un talent prometteur, ne perdit pas un seul instant pour le mettre en contact avec les arts dramatiques.
Il le conduisit alors sur les planches du Majestic (actuelle salle Atlas à Bab El Oued) et le confia aux bons soins de Rachid Ksentini pour sa mise progressive dans le bain.
L’adolescent Ahmed Ayad porta dès ce jour-là le surnom de Rouiched ; un surnom proposé par Noria selon les dires de cette comédienne à la télévision. Ce sobriquet est bien loin d’être fortuit puisque il est tout simplement le diminutif du prénom de celui (Rachid Ksentini) désigné pour assurer la formation sur le tas de la nouvelle recrue.
L’omniprésence de Rouiched aux côtés de son maître et le courant qui circulait à merveille entre l’apprenti et le professionnel qu’incarnait Rachid Ksentini furent à l’origine des moments d’extase et d’enthousiasme qui marquèrent de leur emprunte indélébile la mémoire du natif de la Casbah d’Alger.
Ce fut donc le début d’une longue carrière de comédien pour Ahmed Ayad, ce jeune algérois d’origine kabyle. Il prit alors progressivement divers rôles dans de nombreux sketchs et autres pièces de théâtre ; nous citerons pêle-mêle : el ghoula, el bouaboune, ah ya hassan…
Rouiched prit plus tard des rôles principaux dans de nombreux téléfilms tel que: Hassan Terro, Hassan Taxi, Hassan Niya…
Dans de long métrage cinématographique, l’Opium et le bâton, inspiré du roman de Mouloud Mammeri, le réalisateur confia à Rouiched le rôle de Tayeb (le harki) qu’il joua admirablement aux cotés de Mahieddine Bechtarzi, Mustapha Kateb, Sid Ali Kouiret, Jean Louis Trintignant, Marie Josée…
Au cours de sa longue carrière de comédien de quelques six décennies, Rouiched joua pratiquement avec toutes les figures emblématiques du théâtre algérien. Entre autres citons : Mouloud Touri, Hassan el Hassani, Nouria, Keltoum, Farida Saboundji, Yasmina, Larbi Zekkal, Mohamed Ouniche, Sid Ahmed Agoumi…
Rouiched fait également partie de la troupe du théâtre radiophonique de radio Alger, de la chaîne kabyle, auprès de : Ali Abdoun, Mouhamed Hilmi, Kaderi Sgheir, Cheikh Noredine (dans son rôle régulier de Khalti Addouda), Said Hilmi, Samira… Toujours au plan radiophonique Rouiched forma un trio avec les deux cousins Hilmi, vers la fin des années 1950 pour animer ensemble l’émission satirique s’intitulant «Tlata izehwaniyen» (les trois farceurs) sur les ondes de la chaîne kabyle. L’action de Rouiched ne s’arrêta pas là puisque entre 1940 et 1960, il produisit de nombreuses chansonnettes humoristiques en arabe dialectal et en kabyle.
En somme, une carrière bien remplie et une mission accomplie pour cet artiste de renom que fut Ahmed Ayad. Mustapha Ayad prend le relais de son géniteur.