Sept ans après sa disparition, Assia Djebar, icône universelle de la littérature francophone, dont différents ouvrages ont été repris dans plusieurs langues, continue de fasciner et susciter l’admiration des lecteurs, à travers une plume profondément attachée à la culture ancestrale et à la mère patrie, qui éclaire et prône le progrès de l’individu, tout en mettant à nu les travers des sociétés aux conservatismes aveugles.
Après toute une vie au service de la littérature algérienne et à travers une œuvre riche et variée, la célèbre romancière algérienne, disparue le 6 février 2015, était également investie par la noble mission de défendre la cause de la liberté en général, et l`émancipation de la femme en particulier.
Née le 30 juin 1936 à Cherchell non loin d`Alger, Fatma-Zohra Imalayène, de son vrai nom, avait exprimé sa sensibilité de femme et de militante de la cause nationale dès 1957, à l’âge de 21 ans, en publiant son premier roman « La soif », puis un second, « Les impatients », dans la même période.
Elle enchaînera ensuite avec une vingtaine de romans à succès, traduits en autant de langues, tout en exerçant sa passion pour l’enseignement de l’histoire et de la littérature, à Alger et à l’étranger, et en s’essayant, non sans succès, au cinéma avec la réalisation de deux films consacrés au combat des femmes, notamment, « La Nouba des femmes du mont Chenoua » (1978), qui a obtenu le prix de la critique internationale à Venise en 1979.
Avec « La Zerda ou les chants de l`oubli » (1982), elle remportera le prix du meilleur film historique au Festival de Berlin en 1983 et son roman « Loin de Médine » (1991) symbolisera longtemps sa lutte permanente pour les droits de la femme.
En 2005, elle devient la première femme arabe et africaine à entrer à l’Académie française, élue parmi « les immortels » au cinquième fauteuil, quelques années seulement après avoir investi l’Académie royale de Belgique.
« J’écris, comme tant de femmes écrivains algériennes, avec un sentiment d’urgence, contre la régression et la misogynie », disait la romancière.
A l’histoire de son pays qu’elle n’a jamais vraiment quitté, celle que l’on attendait pour le Prix Nobel de littérature quelques années avant sa disparition, aura dédié plusieurs de ses romans où elle évoque, selon les œuvres, l’Algérie sous la colonisation, l’Algérie indépendante et jusqu’à l’Algérie de la décennie tragique du terrorisme.
« Les enfants du nouveau monde » (1962), « Les alouettes naïves » (1967), ou encore « Femmes d’Alger dans leur appartement » (1980), et « L’amour, la fantasia » (1985), « Le Blanc de l’Algérie » (1996) et « La Femme sans sépulture » (2002), sont parmi les titres où se mêlent tous les combats libérateurs qu’elle voulait mener et incarner.
« Prolixe, Assia Djebar concentrait ainsi en elle tous les genres de la création littéraire, cinématographique et même du théâtre avec une recherche perpétuelle de l’innovation mise au service d’une vision humaniste de la vie sur Terre », s’accordent à dire ceux qui l’ont lue, connue et côtoyée.
Elle obtiendra des prix internationaux pour la plupart de ses romans dont « Nulle part dans la maison de mon père » (2007), un récit autobiographique qui fera l’objet de nombreux articles dans des publications spécialisées d’Europe et du Moyen-Orient, la mettant régulièrement à l’honneur en tant que « voix unique et rare » dans le monde de la culture. Son attachement indéfectible à son pays, elle l’exprimera à sa façon en demandant à être inhumée dans sa ville natale de Cherchell.