En période de guerre, il faut rester extrêmement attentif pour comprendre ; il ne faut surtout négliger aucun indice susceptible d’aider à la compréhension de l’ensemble, tant les intrications sont plus puissantes qu’on ne le pense à la première lecture. Si les déflagrations s’opèrent en Ukraine, les répliques s’entendent aussi dans la région maghrébo-sahélienne.
La « cabale » montée contre le Mali au sujet d’allégations d’exactions contre les civils semble apparemment viser plus Moscou que Bamako. Chassée du Nord-Mali, presque humiliée par le colonel Assimi Goïta, la France ne semble pas prête à quitter le Mali dans l’immédiat, encore moins le Sahel, terrain de chasse privilégié de l’Elysée et de la DGSE. Aussi les accusations d’exactions sont remontés jusqu’aux instances onusiennes, après avoir traversé toute les capitales européennes où Paris a des oreilles attentives. Il était attendu, arrivé à ce point de situation, qu’une enquête atterrisse à Bamako. Mais il n’en fut rien : Moscou a bloqué toute action contre son allié malien.
En Libye, le maréchal Haftar fait du forcing pour, premièrement, déloger Debibeh, et secundo, pour installer son allié Farid Bachagha comme seul et unique chef du gouvernement. Mais son plan dépasse de loin Bachagha : la présidentielle. Cela fait plusieurs mois qu’il a troqué son treillis militaire pour le costume-cravate et se voit déjà roi à la place du roi. Proche des Israéliens, qui le dotent de moyens sophistiqués pour espionner ses adversaires et avoir une longueur d’avance sur eux, il est un danger pour l’Algérie, en ce sens que ses objectifs sont à l’opposé de la politique étrangère algérienne. Les Libyens le rejettent dans leur grande majorité, il s’impose dans le Cyrénaïque par le feu et par le sang, ne tolérant aucune récrimination d’aucune sorte contre sa politique. Un homme à surveiller comme le lait sur le feu.
Le « jeu de dominos » encercle l’Algérie de tous les côtés. Par un imperceptible mouvement, chaque domino est destiné à faire tomber un autre : le Maroc « grenouille » avec Madrid et les autres capitales occidentales, le Sahara occidental qui met fin à tout contact avec l’Espagne, la Tunisie, engluée dans des choix constitutionnels discutables qui isolent Kaïs EssaIed, le Niger, maillon faible des « pays du champ », qui prend position avec la France, ouvre ses bases de drones aux Français et aux Américains, la Mauritanie, autre maillon faible à la lisière algéro-saharienne, etc. Soit autant d’images qui défilent à grande vitesse et dont il ne faut négliger aucune séquence, tant tout s’imbrique dans tout, et tant tout est au final, décisif.
