Des prix hors de portée, avec la pomme de terre qui tangue entre 120, 150 et 170 dinars, des haricots verts à 350 dinars, sans parler de la viande blanche ou rouge. Pour les ménages algériens, le ramadan 2022 s’inscrit sous le signe de la rareté et de la cherté.
Toutes les garanties données par le ministère du Commerce n’auront été que de vains mots. Après avoir attendu que la première semaine passe pour que les prix baissent, comme prévu, ceux-ci, au contraire, ont connu une remonté « insultante » pour les salariés et les ménages de la classe moyenne. La classe laborieuse semble avoir été passée sous le rouleau-compresseur financier.
Si les fausses prévisions des pseudo-experts en tout et en rien doivent être enregistrés pour en tirer les conclusions, force est de constater que cette situation va créer – si elle ne l’est déjà – des zones de turbulences qui menaceront dans un premier temps, la cohésion sociale, chacun jouant en solo pour s’approvisionner à ses frais et à ses réseaux, puis, dans un second temps, peuvent se transformer en réelle menace à la sécurité sociale.
C’est dans cette perspective que l’expert en économie, Abderrahmane Mebtoul, à tiré la sonnette d’alarme en donnant les six raisons du processus inflationniste en cours. Selon lui, la forte hausse des prix menace la cohésion sociale et la sécurité nationale. Pour le professeur, comprendre le processus inflationniste en Algérie implique, selon une vision dynamique, à la fois de le relier aux équilibres macroéconomiques et macro sociaux inséparables des mutations internes et mondiales, et à la répartition du revenu entre les différentes couches sociales.
Pour le cas de l’Algérie, selon les données officielles, le taux d’inflation cumulé – l’indice n’a pas été réactualisé depuis 2011 – approche les 100% entre 2000 et 2021 avec un pic, selon le gouverneur de la Banque d’Algérie, de 9,2% en octobre 2021 et à cette tendance pouvant fluctuer en 2022 entre 14/20%, laminant le pouvoir d’achat et posant un problème de la cohésion sociale et donc de la sécurité nationale : « En ce mois d’avril 2022 et cela a été le cas pour toute l’année 2021, le processus inflationniste a atteint un niveau intolérable: plus 100% pour les pièces détachées et les voitures, entre 50/100 % pour certains produits alimentaires, parallèlement à une pénurie de nombre de produits. Nous ne devons pas nous réjouir donc d’un excédent de la balance commerciale qui provoquerait une paralysie de l’économie », dit Mebtoul.
La première raison selon lui, est l’inflation importée. Le taux d’inflation de la zone euro a atteint un niveau record de 4,9% en 2021, avec en Allemagne et aux États-Unis 6%, la BCE prévoyant une hausse de 3,2% pour 2022 alors qu’en 2020. La deuxième raison est la faiblesse du taux de croissance interne, résultant de la faiblesse de la production et de la productivité, et les restrictions aux importations. La troisième raison est la dépréciation officielle du dinar. La quatrième raison est liée au niveau des réserves de changes qui tiennent la cotation du dinar à plus de 70%. La cinquième raison est l’importance du marché informel, qui sert de soupape de sécurité sociale à court terme, mais entrave le développement à moyen terme. La sixième raison est la corruption à travers les surfacturations.
En conclusion, le professeur estime que du fait des tensions budgétaires, de l’accroissement du taux de chômage et du retour de l’inflation avec la détérioration du pouvoir d’achat, s’impose la relance économique pour 2022, conditionnée par la lutte contre le terrorisme bureaucratique, la corruption qui étouffe les énergies créatrices, mettre fin à l’instabilité juridique et monétaire, la vision purement monétariste afin de préserver les réserves de changes, sans vision stratégique, amplifiant la crise.