Les places au Sahel coûtent cher. Aussi, les puissances occidentales mettent tout en œuvre pour y poser pied, et si les conditions le permettent, prendre racine.
La France a été révoquée d’un bout à l’autre de l’Afrique, mais n’est pas prête à lâcher prise. Preuve en est, la récente visite du président français Macron en Afrique pour rectifier le tir, changer les formes, sans prendre garde à lui-même que le fond demeure le même. Le froc de Jacques Foccart a été mis au placard, mais les objectifs n’ont pas connu de changements.
Les Etats Unis, qui n’ont pas été loin du Sahel depuis que les faucons ont chuchoté dans l’oreille de Bush fils l’opportunité d’y implanter un commandement US, en 2007, reprennent des couleurs à la faveur de la révocation de Barkhane, l’allié dans la lutte antiterroriste.
C’est dire combien les alliances sont fragiles quand il s’agit d’intérêts stratégiques. C’est dire également combien la lutte antiterroriste reste un fourre-tout à la Prévert pour tout y mettre, sans craindre le contredit.
Et c’est dans ce contexte que le nom de Youcef al-Annabi a été ressorti et assorti au gout de la saison. A ce stade, n’est rien fortuit, tout est mené avec la régularité d’un métronome.
Le journaliste français qui a pu avoir un entretien avec le chef d’Al Qaïda au Maghreb, qui se trouve être au Nord-Mali, dans le vaste espace compris entre Kidal et l’Adrar des Ifoghas, n’a pu le faire sans une précieuse aide des agents français du renseignement en Mauritanie, un des derniers bastions de « la Piscine » au Sahel.
Et pour dire quoi ? Pour donner des informations « généralistes » qui n’ajoutent rien à ce que l’on sait. Mais qui remettent sur selle le grabataire chef de l’organisation, qui a été contraint de fuir le nord algérien depuis des années pour trouver refuge dans l’aride désert de Kidal et des alentours.
Cette remise sur rails obéit à quels objectifs ? La réponse est simple : à donner l’impression que Al Qaida demeure toujours un danger au Sahel, qu’elle se dilate vers le Golfe de Guinée et qu’elle constitue un danger direct et imminent pour les pays de la région, dont l’Algérie. Sous-entendu : vous avez encore besoin de nous (Français) pour la lutte finale et décisive contre le terrorisme.
Un bref regard sur la cartographie terroriste du monde arabo-musulman donne pourtant, la réponse que les Occidentaux n’aiment pas entendre : là où les forces occidentales se trouvent, les uns attirant les autres comme des mouches.
Al Annabi n’a jamais été un homme d’action. Il s’agit d’un conseiller juridique, le nez toujours sur ses livres, et qui a toujours été le « pantouflard » d’AQMI.
S’il a été plébiscité à la mort de Abdelmalek Droukdel, c’est parce qu’il n’y avait plus aucun chef pour le faire. Aujourd’hui, au sahel, tous les cadors de Nosrat le savent. L’influence des Algériens est réduite à sa plus simple expression. Fini le temps des Abou Zeid, Abou el Houmam et Mokhtar Mohamed Belmoktar. C’est la figuration formelle pour Al Annabi. Ce sont là les réalités du terrain, et non pas des humeurs de journaliste.