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Cheikh Kader Sissoko, analyste: « La CEDEAO mérite d’être réformée pour être au service des nos intérêts vitaux »

Depuis le coup de force contre le président élu Mohamed Bazoum, le Sahel est en ébullition. Même si le Niger semble relativement calme, le voisinage est dans une situation de fébrilité totale, en attente de voir comment et dans quelle direction vont évoluer les choses.

Analyste politique de talent, haut fonctionnaire au Mali, Sissoko nous livre son analyse sur un sujet, qui, en fait, dépasse la seule situation au Niger et se rattache à des données, comme nous allons le voir, à la fois géographiques, ethniques et de stratégie. Il jette surtout un éclairage inédit sur les liens puissamment ethniques entre le Niger, le Mali et le Burkina.

« La chute du régime libyen en 2011 a plongé les États du Sahel dans une situation d’insécurité désastreuse. En effet, le Mali, le Niger et le Burkina, notamment, font face au terrorisme international conduit par le GSIM et l’EIS, depuis 2012, sans repos.

Cette situation est confirmée par le baromètre du terrorisme international (indice mondial du terrorisme, publié chaque année par l’ONG Institut d’Economie et de Paix basé en Australie) qui estime qu’en 2023, le Burkina est le second pays le plus affecté par le terrorisme et le Mali le quatrième.

« En premier lieu, je cite la mutualisation des systèmes de défense nationale. En effet, les trois pays les plus touchés, en l’occurrence le Mali, le Burkina et le Niger, cumulent près de 3 millions de km2, sans aucun accès à la mer. Ce qui pose un enjeu énorme en termes de gestion des frontières.

Sans mutualisation des stratégies de défense territoriale, ce vaste territoire continuera d’être une aubaine pour le terrorisme international qui, de surcroît, trouve sur place une population pauvre et vulnérable, en raison des conditions climatiques et du déficit de bonne gouvernance, entre autres.

C’est d’ailleurs ces facteurs qui ont justifié la création du G5 Sahel, sur initiative de la France mais qui n’a, hélas, pas donné de résultats, en raison notamment d’un montage dont on ignorait suffisamment les véritables raisons.

« En second lieu, il y a lieu de promouvoir une véritable intégration, en matière de développement économique et social. Ce défi est indispensable pour la survie des États du Sahel dans le long terme.

Les statistiques récentes évaluent à près de 71 millions les populations des trois pays durement touchées par le terrorisme dans l’espace sahélien. Aussi, les économies desdits pays sont basées fondamentalement sur des systèmes de production agro‐pastorale. Il s’agira donc de mieux s’organiser pour créer un avantage comparatif par rapport au reste du monde.

Sur le plan social, la structure des populations est également quasiment la même. Une population essentiellement jeune qui nécessite tout simplement d’être suivie, en vue de capter les dividendes démographiques (formation de qualité surtout, adaptée au contexte, mise en œuvre de réformes favorisant la création d’emplois).

« A côté de ces défis pour ces trois pays touchés par l’insécurité, l’organisation sous‐régionale, la CEDEAO, mérite d’être réformée et de devenir véritablement une organisation ouest‐africaine, au service des intérêts vitaux et stratégiques des pays membres.

Lesdites réformes devront se focaliser sur l’instauration d’institutions démocratiques capables de garantir un État de droit, de justice, de paix, le bannissement des coups d’État et la promotion de réformes institutionnelles susceptibles de rendre son espace compétitif ».

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