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«La victoire de l’extrême-droite en France reste une affaire franco-française»

Le tremblement de terre causé par la victoire du Rassemblement national (RN) aux élections européennes a poussé le président Emmanuel Macron à dissoudre l’Assemblée nationale et convoquer de nouvelles élections législatives les 30 juin et 7 juillet prochains.

Un pari risqué pour le camp présidentiel, déjà en situation de majorité relative au Parlement, qui pourrait être contraint à une cohabitation en cas de victoire du RN. Plusieurs experts se sont exprimés sur les répercussions que pourrait avoir la prise de pouvoir par l’extrême-droite sur la communauté maghrébine immigrée en France.

Qu’en est-il exactement ? Y a-t-il réellement à craindre ? L’Express se penche sur le sujet avec le Dr M’hamed Benkhrouf, analyste politique spécialiste en relations internationales, et qui est également président de l’Alliance internationale des compétences algériennes à l’étranger. Il est installé à Paris, en France, depuis de nombreuses années, en étroite relation avec la communauté nationale.

Quelles incidences pourrait avoir le fait de retrouver l’extrême-droite française aux portes du pouvoir en France sur les pays maghrébins, lesquels ont une puissante communauté émigrée en hexagone ?

Vous voulez dire sur les relations bilatérales et sur la gestion de la communauté nationale, certainement. Je vais vous le dire directement : aucune ! Il n’y aura aucune incidence sur la communauté émigrée, quel qu’en soit le vainqueur. La victoire de l’extrême‐droite française est une affaire franco‐française N’oubliez pas que vous parlez du pays des droits de l’homme, qui a été édifié sur les principes de justice et d’équité.

De ce fait, quel que soit le parti qui prendrait les rênes du pouvoir, il sera balisé par les principes fondateurs de l’Etat et par la Constitution ; il ne sera pas libre de faire ce qu’il veut ou d’entreprendre une politique qui ne soit pas une politique d’Etat. L’Etat français est un Etat qui a des relations avec ses partenaires, qui respecte ses engagements internationaux, qui se doit de les respecter, sinon il se mettrait lui‐même en péril.

Maintenant, si vous parlez des communautés maghrébines en France, il faut garder à l’esprit qu’il s’agit de personnes qui ont la nationalité française, qui ont le droit de revendiquer leurs droits et d’agir dans le cadre de la citoyenneté française.

Concernant les craintes et les soucis qu’évoque la communauté des émigrés, il s’agit plus de personnes qui n’ont pas la nationalité française et des migrants clandestins.

La France est un Etat qui respecte ses composants, qui a été édifié sur le respect de ses principes fondateurs ; c’est pour cette raison qu’on y retrouve des communautés du monde entier, et pas seulement maghrébines ou arabes. Maintenant, si on pense que les droits des migrants seront bafoués sous le règne du Rassemblement national en cas de prise de pouvoir, je pense qu’il y a méprise.

Leurs droits ont‐ils été respectés sous le règne des différents présidents ? Les gouvernements successifs en France n’ont‐ils pas échoué lamentablement dans leur politique de l’immigration sous la droite comme sous la gauche ?

J’ai été personnellement témoin de cet échec sous le mandat de François Mitterrand lorsqu’une ministre du gouvernement renvoyait par charter les migrants vers leur pays d’origine. En réalité, on a tendance à utiliser cette carte comme un atout pour des objectifs électoraux précis.

Des parties en France dénoncent l’accord Algéro-français de 1968. quels sont leurs objectifs ?

La dénonciation de l’accord algéro‐français de 1968 ‐ qui a été également une attaque dirigée contre l’Algérie ‐ n’a pas été le fait du Rassemblement national, le Premier ministre de l’ancien gouvernement, Édouard Philippe, ayant été le premier à en faire mention.

Cet accord historique n’est pas un accord français, mais un accord entre l’Algérie et la France. Il est intervenu dans le cadre de la poursuite des accords d’Evian, pour compléter les intérêts et les droits tant des Algériens que des Français, par la libre circulation entre les deux pays, par des relations économiques et commerciales privilégiées, etc. C’est ce que doivent savoir les personnes qui en critiquent le contenu.

Cette victoire encombrante de l’extrême-droite française est d’autant plus malvenue qu’elle intervient dans un contexte international hostile…

Le monde traverse une série de turbulences politiques et géopolitiques qui ont des répercussions internationales mais aussi au niveau des pays, plus particulièrement l’Occident, qui a abouti à cette crise politique interne entre les forces politiques traditionnelles gauche‐droite.

Ceci a eu pour effet, également, de faire émerger l’extrémisme dans la plupart des pays européens, en particulier les grandes puissances qui ont perdu d’une part le contrôle de leurs propres stratégies politiques, économiques et sociales, qui justifie d’une part l’échec des gouvernements de répondre aux attentes des citoyens en matière de travail, de logement, d’accès aux services de solidarité nationale, et ce cumul à préparer le terreau de l’évolution des formations politiques d’extrême droite et s’imposer comme sauveur de la Nation, ce qui explique le résultat des dernières élections européennes.

La démocratie est un principe fondamental, menant à respecter les résultats des urnes quoi qu’il arrive, à respecter aussi les engagements et accords signés avec les autres États ; cela évidemment s’inscrit dans le cadre du respect des règles du partenariat et de la coopération internationale.

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