Après le Zellige et le couscous, la paranoïa de nos voisins de l’Ouest, il est vrai que certains d’entre eux carburent au hachich et à l’opium, les a conduits à revendiquer la paternité de la fameuse gazouze (soda) algérienne, propriété depuis 1878 de la société privée Hamoud Boualem dont le siège social et la fabrique étaient à Ruisseau, à Oued Kniss.
Cette fameuse boisson gazeuse, aurait fait des bulles au Maroc, au point que les marocains ‘’et fiers de l’être’’ ont en revendiqué la paternité. Guerre des nerfs, guerre psychologique menées par le Makhzen contre son voisin de l’est ? A quels dessins ? Va savoir !
En remontant les marches du temps et en parcourant les grands espaces maghrébins, depuis l’époque médiévale selon l’expression de Mahfoud Kaddache, on s’aperçoit que le vol et l’escroquerie du Makhzen sont sans pareils. Sans limites.
Qu’on en juge : Dans son volumineux ouvrage ‘’Histoire des berbères de l’Afrique septentrionale’’, Ibn Khaldoun avait abondamment cité les tribus et les descendances des grandes familles de la ville de M’sila, dans le Hodna, qui avait comme capitale médiévale la Kalaa des Beni Hammad, cité Sanhadja fondée par les zirides et érigée dans les montagnes des Maadid, entre le sud et le nord de l’Algérie.
Il est intéressant de relever à ce niveau que le style architectural de cette Kalaa (ou Tour), construite vers l’an 1007 par Hammad Ibn Bologhine, fils de Bologhine Ibn Ziri Menad Abou Ziri, fondateur d’Alger, ressemble étrangement avec celui adopté, depuis sa destruction lors de l’invasion des Almohades et Abdelmoumene Ibn Ali du royaume des Hammadites vers 1142, pour la construction de la Tour Hassan, inachevée d’ailleurs, à Rabat, au Maroc.
Cette Tour, qui devait être le plus grand minaret du monde musulman, a été entamée vers 1196 sous les ordres du sultan Yaacoub El Mansour. Sa mort en 1199 signa également l’arrêt des travaux de construction de la mosquée, et de la Tour.
Son architecte et concepteur serait Ahmed Ben Baso, architecte également de la mosquée Koutoubia de Marrakech (début de la construction en 1120 et fin des travaux en 1148 sous la direction d’Abdelmoumen, conquérant de Marrakech) et de la Giralda de Séville.
Défaits, envahis par les tribus hilaliennes, qui avaient combattu à leurs côtés les envahisseurs almohades, les Hammadites partent alors s’exiler du côté de Bejaïa, où ils redonnent une seconde vie à leur dynastie.
Les Almohades et Ibn Ali continuent leur invasion en Algérie, non sans piller le bien le plus précieux de cette civilisation très raffinée : sa culture, et en particulier son style architectural, et la finesse de ses conceptions architecturales, qui ont donné vie au style maghrébin.
Antérieure aux tours de la mosquée El Koutoubia de Marrakech (1147), la Tour Hassan de Rabat (1196), le Mechouar de Tlemcen (1248), la Kelaa des Beni Hammad, dans les Maadid, aux portes du désert algérien, a servi, depuis cette invasion, comme modèle à toutes les constructions almohades, celles prétendument propres au style architectural médiéval marocain.
Non seulement détruite et pillée, la capitale des Beni Hammad l’a été doublement au regard de l’histoire de l’évolution des dynasties du Maghreb central : son architecture a été volée et exportée vers le Maroc puis en Andalousie, qui en a revendiqué la paternité ; ensuite dépouillée de son identité et sa survie ne l’a été que grâce à un dramatique exil vers les bords de la Méditerranée.
Aujourd’hui, tous les manuels scolaires et universitaires d’Histoire ainsi que les brochures pour touristes mentionnent que les constructions marocaines médiévales, dont les mosquées et les Tours, sont le fruit de la conception d’architectes marocains, qui ont exporté leur savoir en Andalousie, puis vers l’ensemble du Maghreb, de Marrakech à Oran, Alger, Tlemcen, Tunis et plus loin Tripoli.
Cette digression sur le rapt culturel du Maroc des biens des dynasties maghrébines médiévales envahies par les différents sultans almohades, nous ramène à Ibn Khaldoun qui revient longuement sur ces faits, à travers sa Mouqqadia (les Prolégomènes) où il explique sa théorie de l’évolution des dynasties berbères, la Açabya et la grandeur et la décadence des dynasties maghrébines.
Aujourd’hui, bien après ces événements qui ont bouleversé l’ordre des choses au Maghreb, il est remarquable de constater que ni les historiens, ni les politiques, encore moins les universitaires en Algérie et en Tunisie, sont en train de relever cette double escroquerie du Makhzen, qui a spolié les civilisations qu’il a détruites au fil des âges, dont celle des Beni Hammad, et volé leurs cultures, comme il se bat aujourd’hui bec et ongle pour s’en prévaloir, et les a inscrits au patrimoine mondial de l’UNESCO. L’imposture n’a pas de limite. Le Maroc, un invétéré pilleur de civilisations ?