Les essais nucléaires français dans le désert algérien entre 1960 et 1966, sont l’un des contentieux non encore aplanis entre l’Algérie et la France.
Le fait que les archives de ces essais soient classées par le Parlement français dans la catégorie « incommunicable » témoigne de la volonté de la France de cacher et de conserver pendant longtemps cet héritage colonial, qui est pourtant l’un des principaux enjeux du travail mémoriel entre les deux pays.
Jusqu’à présent, d’après des experts en la matière, les conséquences dramatiques de ces essais nucléaires, tant sur le plan sanitaire qu’environnemental, demeurent toujours présentes.
Les retombées de ces essais sont tellement dramatiques que certains acteurs liés à ce dossier sont allés, en se référant au droit international humanitaire, jusqu’à les qualifier de « génocide ».
Le rappel à l’ordre envoyé récemment par des rapporteurs de l’ONU à la France concernant ce dossier illustre son importance et sa sensibilité.
La France est, en effet, sommée d’assumer pleinement son mauvais passé nucléaire.
Selon des sources médiatiques, le 13 septembre dernier, par le biais de sa mission auprès de l’Office des Nations Unies à Genève, le gouvernement français a été destinataire d’une correspondance le sommant de divulguer des informations sur ces essais nucléaires en terre algérienne, leurs conséquences sur l’homme et l’environnement à moyen et long terme, ainsi que les mesures prises pour indemniser les victimes.
Corédigée par le Rapporteur spécial sur les droits de l’homme et les déchets dangereux, le Dr Marcos Orellana, le Rapporteur spécial sur la promotion de la vérité, de la justice, de la réparation et des garanties de non-répétition, le professeur Fabian Salvioli, et l’experte indépendante sur les droits des personnes âgées, Claudia Mahler, cette correspondance qui s’ouvre sur un rappel historique de ces essais qui on débuté avec « la Gerboise Bleue » , s’étale sur les conséquences importantes sur l’environnement et sur la santé de la population locale, qui s’étendent sur plusieurs générations, et s’achève en recommandant à la France d’assumer ses responsabilités notamment en décontaminant les sites contaminés et en indemnisant les victimes.
Selon les rapporteurs onusiens, ces essais ont laissé des conséquences considérables. Des centaines de kilomètres de zones contaminées, des centaines de personnes, qu’elles soient militaires ou civiles, touchées et développant différents cancers, et d’autres ayant perdu la vie sans que justice ne leur soit rendue.
En plus de déclasser les archives liées à ces essais, la France est appelée à procéder au nettoyage des zones d’enfouissement des déchets radioactifs provenant des explosions, à la décontamination des zones encore touchées par la radioactivité et à l’indemnisation de l’ensemble des victimes.
Il est vrai que, depuis la loi dite Morin adoptée en janvier 2010, la France a pris des engagements répétés pour restituer les archives liées à ces explosions nucléaires, réhabiliter les sites où se sont déroulés les essais, et indemniser les victimes, mais, jusqu’à présent, hormis de jolis discours, rien de sérieux n’est engagé, pour la prise effective de ce dossier.
L’Algérie a créé en 2021 l’Agence nationale de réhabilitation des anciens sites d’essais et d’explosions nucléaires français dans le Sud algérien, placée sous la tutelle du ministre de l’Énergie, mais pour remplir sa mission, cette agence doit disposer de toutes les cartes et données sur les sites d’enfouissement des déchets contaminés, radioactifs ou chimiques ainsi que de la description minutieuse de tout ce qui a trait à ces déchets ainsi qu’aux matériaux employés pour les cacher.
Or, la France refuse toujours de divulguer les informations sur ces essais nucléaires menés à partir de 1960 jusqu’à 1966. L’interpellation des rapporteurs de l’ONU, décidera-t-elle enfin la France à assumer ses responsabilités ?