C’est un rendez-vous crucial qui s’est ouvert hier à Addis-Abeba. La 46e session ordinaire du Conseil exécutif de l’Union africaine (UA), prépare le terrain pour le sommet des chefs d’État et de gouvernement prévu les 15 et 16 février. En jeu, le renouvellement des instances de l’organisation continentale, à commencer par la Commission de l’UA et le Conseil de paix et de sécurité, mais aussi une réflexion de fond sur les défis auxquels fait face l’Afrique dans un contexte international en mutation.
Dans cet aréopage diplomatique, l’Algérie s’est positionnée en acteur clé. Son chef de la diplomatie, Ahmed Attaf, ministre d’État, ministre des Affaires étrangères, de la Communauté nationale à l’étranger et des Affaires africaines, a marqué les esprits dès l’ouverture des travaux. Face aux crises qui s’accumulent et aux ingérences qui se multiplient, l’Afrique doit impérativement réinventer son organisation continentale, a-t-il insisté.
Pour Ahmed Attaf, le moment est critique. L’ordre mondial est en pleine recomposition, et l’Afrique risque d’en être la grande oubliée si elle ne s’organise pas rapidement. « La conjoncture internationale actuelle est caractérisée par une remise en cause des principes et valeurs qui ont longtemps structuré les relations internationales », a-t-il averti, pointant un environnement où la force prime sur le droit et où les équilibres traditionnels « vacillent », sous l’effet de tensions géopolitiques inédites.
Dans ce contexte, l’Union africaine ne peut plus se permettre de rester un simple spectateur. « Nous devons nous doter de mécanismes concrets pour défendre nos intérêts communs, au lieu de subir les dynamiques internationales sans y avoir notre mot à dire », a plaidé le ministre algérien.
Le sommet des 15 et 16 février doit ainsi servir de tournant pour repenser l’architecture institutionnelle de l’UA et en renforcer la gouvernance. Loin d’être une formalité diplomatique, il s’agit d’une opportunité cruciale pour redonner à l’organisation son poids perdu.
Au fil des années, l’Union africaine a vu son influence s’éroder, laissant le champ libre à des puissances étrangères qui avancent leurs pions sur le continent. Son rôle dans la résolution des crises africaines est de plus en plus marginalisé, notamment dans des conflits majeurs comme ceux du Sahel, de la Corne de l’Afrique ou encore de la région des Grands Lacs. L’UA a été affaiblie, son autorité fragilisée, son prestige entamé. Il y a nécessité de corriger cette trajectoire ».
L’Algérie milite ainsi pour une Union africaine plus efficace, avec des critères de gouvernance financière et administrative plus rigoureux, afin de mettre un terme aux dysfonctionnements structurels qui entravent son action.
Sur le terrain de la paix et de la sécurité, le chef de la diplomatie algérienne a insisté sur le rôle que doit jouer l’UA dans la prévention et la gestion des conflits sur le continent. En marge des travaux, Ahmed Attaf a multiplié les entretiens bilatéraux avec ses homologues africains, cherchant à renforcer les alliances de l’Algérie sur le continent. Il a ainsi rencontré Badr Abdelatty, ministre des Affaires étrangères et de l’Immigration d’Égypte, pour discuter des préparatifs des échéances bilatérales de haut niveau, mais aussi de la coordination sur la question palestinienne, qui sera au centre d’un sommet arabe d’urgence.
Avec Maria Manuela dos Santos Lucas, ministre des Affaires étrangères du Mozambique, les échanges ont porté sur les moyens de maintenir la dynamique positive des relations bilatérales et sur les dossiers clés au sein de l’UA. Samuel Okudzeto Ablakwa, ministre ghanéen des Affaires étrangères, s’est, quant à lui, entretenu avec Attaf sur les enjeux sécuritaires régionaux et les perspectives de coopération accrue entre les deux pays.
L’Algérie a également réaffirmé sa volonté de renforcer son partenariat économique avec la Côte d’Ivoire, lors d’une rencontre entre Attaf et Kacou Houaja Léon Adom, ministre ivoirien des Affaires étrangères et de l’Intégration africaine. L’objectif, favoriser une collaboration plus étroite dans les domaines stratégiques, notamment en matière d’investissements et d’infrastructures.
Les discussions avec Albert Shingiro, chef de la diplomatie burundaise, ont permis de faire le point sur les mesures concrètes à mettre en œuvre suite à la visite d’Ahmed Attaf à Bujumbura en décembre dernier, notamment pour redynamiser les mécanismes de coopération bilatérale.
Par ailleurs, le ministre algérien a échangé avec Lejone Mpotjoane, ministre des Affaires étrangères du Lesotho, sur les défis liés au soutien des causes justes en Afrique, réaffirmant le rôle historique de l’Algérie dans l’appui aux mouvements de libération et à la défense des droits des peuples opprimés.
Enfin, une réunion avec Tahir Baour, ministre libyen des Affaires étrangères par intérim, a permis d’aborder les points inscrits à l’ordre du jour du sommet de l’UA, ainsi que les perspectives de coopération entre Alger et Tripoli dans un contexte où la stabilité de la Libye demeure un enjeu majeur pour la sécurité régionale.