Hier, à Ryad, dans la capitale saoudienne, les deux géants américain et russe, les principaux détenteurs d’un prodigieux complexe militaro-industriel avec des armements de pointe et hypersophistiqués, se sont rencontrés et discuté d’abord du rétablissement des relations entre Washington et Moscou.
Certes, le conflit en Ukraine a été le fil conducteur de ce mini-sommet des chefs de la diplomatie des deux pays, mais ce n’était pas le principal sujet de conversation entre Marc Rubio et le vétéran Serguei Lavrov, mais, en quelque sorte, un premier pas pour un rapprochement entre les deux capitales que la donne ukrainienne et les enjeux géopolitiques et économiques en Europe et au sein des pays de l’OTAN avaient séparés.
À Ryad, donc, les discussions se sont tenues sans les pays membres de l’UE, mis de côté, tout autant que l’Ukraine, même si l’essentiel de ces pourparlers avait porté sur la résolution du conflit ukrainien.
Le fait que les Européens ne soient pas conviés à ce mini-sommet est une sorte de camouflet pour Bruxelles et la tentative du président français Macron de constituer un front anti-sommet russo-américain à Ryad. Mais, durant les quatre heures qu’auront duré les discussions américano-russes, un espoir de reprise des relations bilatérales entre les deux pays et un début de résolution du conflit en Ukraine pointent déjà à l’horizon.
Même si le trublion de Kiev a critiqué la démarche qui l’a écarté de la table des discussions et appelé à des pourparlers « équitables » sur le conflit ukrainien, incluant l’UE, le Royaume-Uni et la Turquie, Américains et Russes se sont bornés à leur agenda : loin de l’influence négative des Européens et de la présence ukrainienne.
« Les délégations américaines et russes réunies mardi à Ryad se sont entretenues pendant quatre heures et demie et ont eu une discussion fructueuse », a déclaré Iouri Ouchakov, conseiller en politique étrangère du président russe Vladimir Poutine.
Ces discussions ont, selon lui, évoqué les modalités d’un sommet entre Vladimir Poutine et son homologue américain Donald Trump, qui ne devrait toutefois probablement pas avoir lieu dès la semaine prochaine, a-t-il confié à l’agence Tass.
Selon Marco Rubio, « il y aura des échanges et des consultations avec l’Ukraine et les partenaires européens », alors que le chef de la diplomatie russe a indiqué qu’il faut « entretenir un dialogue et tirer des leçons de ce qui se passe, et ne pas laisser des conflits et des crises éclater ».
Sergueï Lavrov, en chevronné de la diplomatie, a expliqué les différents points discutés lors de cette rencontre : sur les relations Russie-USA, il a dit que la partie américaine a souligné la nécessité pour la Russie et les États-Unis d’être guidés par les intérêts nationaux, et Moscou est d’accord avec cela.
« La Russie et les États-Unis souhaitent reprendre les consultations sur les questions géopolitiques et éliminer les obstacles à la coopération économique », « la Russie et les États-Unis ont convenu de nommer au plus tôt des ambassadeurs à Moscou et à Washington », « les deux parties ont également convenu de créer les conditions pour que leur coopération bilatérale reprenne pleinement et s’étende à divers domaines », « il y a des raisons de croire que la partie US commence à mieux écouter la position de la Russie ».
En outre, Lavrov a expliqué, dans des déclarations à la presse russe sur le contenu de ses discussions avec son homologue américain, que « la Russie a senti la détermination des États-Unis à « aller de l’avant », et Moscou y est aussi disposé », « la Russie et les États-Unis ont travaillé à l’amélioration de leurs relations au cours des négociations et ont eu beaucoup de succès ».
Sur le dossier ukrainien, Lavrov a indiqué que « Moscou et Washington ont convenu de lancer un processus de règlement du conflit ukrainien dans un avenir proche.
Des négociateurs ont été nommés, mais « la présence de contingents de l’Otan en Ukraine est inacceptable », car « l’élargissement de l’Otan constitue une menace directe pour les intérêts de la Russie ».
Par ailleurs, le ministre russe des Affaires étrangères a déclaré ‘’n’avoir vu aucun rapport sur un soi-disant plan de règlement en trois étapes du conflit ukrainien’’, avant d’annoncer que ‘’les consultations entre la Russie et les États-Unis sur l’Ukraine seront régulières après la nomination des équipes de négociation par les deux parties’’, alors que ‘’l’attaque de drone contre une station russe de pompage de pétrole (lundi, ndlr) ne devrait que renforcer l’opinion de tous qu’il faut redresser Zelensky’’.
Enfin, Lavrov, dans son exposé sur la teneur des discussions américano-russes, a indiqué que « les États-Unis ont proposé d’instaurer un moratoire sur les attaques contre les installations énergétiques en Russie et en Ukraine », et que « la Russie n’a pas l’intention de nuire au système énergétique de l’Ukraine ».
Quatre heures de discussions pleines, franches et directes entre les chefs de la diplomatie américaine et russe, qui ont mis ‘’out’’ l’Union européenne qui tente de voler un rôle dans la résolution du conflit ukrainien qu’elle n’a jamais eu, sauf celui d’une catastrophique ingérence militaire et politique, ont ouvert la voie à une nouvelle dynamique dans les relations souvent froissées entre Washington et Moscou. Autant Trump que Poutine sont d’accord pour mettre fin au plus tôt au conflit en Ukraine, sans ingérence européenne, ni l’alibi de placer l’Otan dans ce pays.