Nouvel épisode dans la saga judiciaire franco-algérienne : la Cour d’appel d’Aix-en-Provence a tranché. L’ancien ministre de l’Industrie, Abdessalem Bouchouareb, condamné dans plusieurs affaires de corruption en Algérie, ne sera pas extradé.
Un refus justifié, selon la justice française, par les « conséquences graves » que pourrait engendrer son transfert sur sa santé. Une décision qui en dit long sur l’état des relations entre Paris et Alger et sur la conception toute particulière qu’a la France de la justice internationale.
L’Algérie avait pourtant multiplié les demandes d’extradition, six au total, en s’appuyant sur l’accord signé en 2019 entre les deux pays. En vain. La justice française a préféré invoquer l’article 3 de la Convention européenne des droits de l’homme et l’article 5 de la convention bilatérale d’extradition.
En clair, elle considère que les prisons algériennes ne garantissent pas un traitement digne à Bouchouareb. Pour appuyer cette thèse, la défense du ministre en fuite s’est empressée de brandir un reportage de Jeune Afrique, publication notoirement hostile à Alger, décrivant un tableau des plus sombres des conditions de détention en Algérie.
Un argumentaire balayé par l’avocate représentant l’État algérien, Sophie Bartex. Elle a rappelé que toutes les garanties avaient été fournies pour assurer la prise en charge médicale du détenu.
« Bouchouareb a volé l’argent des Algériens. Il doit répondre de ses actes devant la justice », a-t-elle martelé. Une évidence, sauf pour la France, qui applique ici une justice à deux vitesses : intransigeante avec les exilés algériens qu’elle presse Alger de reprendre, mais étrangement clémente avec les dignitaires corrompus qui trouvent refuge sur son sol. Car c’est bien là que le bât blesse.
D’un côté, Paris menace de sanctions si l’Algérie n’accueille pas ses migrants en situation irrégulière. De l’autre, elle protège un homme condamné par la justice algérienne, en lui trouvant des excuses sanitaires. Une realpolitik aux relents de cynisme.
Bouchouareb, qui a pillé l’Algérie avec l’arrogance des intouchables de l’ère Bouteflika, peut ainsi couler des jours paisibles en France, loin des tribunaux algériens.
Ce refus d’extradition est un signal lourd de conséquences pour les relations franco-algériennes. Il renforce l’idée d’une France qui, derrière son discours officiel, continue de couvrir les fuyards de la corruption algérienne. Un choix politique déguisé en décision judiciaire. Une fidélité aux vieilles méthodes de la Françafrique, là où l’intérêt prime toujours sur la morale.