La pièce de théâtre « Sekoura », une comédie noire sur le droit de la femme à s’émanciper et disposer de sa vie, est entrée, jeudi à Alger, en compétition du 14e Festival national du théâtre professionnel (Fntp) devant un public astreint au strict respect des mesures préventives contre la propagation de la pandémie du Coronavirus.
Accueilli au Théâtre national Mahieddine-Bachtarzi (Tna), le spectacle d’une durée de 75 mn a été mis en scène par Ali Djebbara, sur un texte adapté par Moulay Meliani Mourad Mohamed, du roman « El Malika » (la reine) de l’écrivain Amine Zaoui, présent dans la salle. Surnom donné à toute femme belle et chic dans les régions berbérophones en Afrique du nord, « Sekoura » (la perdrix en Tamazight), est un nom vernaculaire d’un genre d’oiseaux admiré pour sa beauté et son élégance, mais également prisé comme gibier par les chasseurs. Tout commence dans la morgue d’un hôpital où les premiers extraits du roman, « El Malika » d’Amine Zaoui sont lus, faisant adhérer les huit employés de la Santé qui y travaillent, s’invitant dans l’histoire de
Sekoura, pour pénétrer son univers et incarner ses différents personnages. Vêtue d’une robe rouge, Sekoura, personnage principal du spectacle campé par Loubna Noui, est une femme libre, à la limite de la désinvolture, sujette à tous les « qu’en-dira-t-on ? », car elle venait de divorcer avec son conjoint, sans donner les raisons de sa rupture à l’entourage de son mari. Retrouvant sa liberté, Sekoura s’est remariée avec un chinois en qui, elle a trouvé toute l’attention et le respect dont elle était privé avec son premier mari. Les parents du mari divorcé, rendus par Ali Achi et Michou, la servante joué par Chaima Ouerad, Abderrahmane par Riad Djefaflia, Abdelkader par Brahim Helaimia, l’officier de police par Samir Zafour et le Président de l’Assemblée populaire communale, Chihab Eddine Atrous, cherchent tous à percer le secret de cette rupture, jetant l’opprobre sur Sekoura. Dans la foulée des événements, la servante, victime de la tragédie nationale, raconte son marasme de jeune femme, alors âgée de 16 ans, kidnappée et abusée par plusieurs terroristes, au point de ne pouvoir reconnaitre le père de son enfant parti nulle part lui aussi. Dans un spectacle à rebondissements, l’opposition des visions entre, Sekoura qui veut vivre et disposer de sa vie et tous les autres qui lui dressent des regards obliques, l’accablent de préjugés et la pointent du doigt pour la salir et la déshonorer, a créé une dualité qui a mis à nu l’esprit étroit de l’homme et le regard macho de la société.
Les comédiens ont bien joué
Repoussée dans ses retranchements et accablée par la rumeur, Sekoura lavera son honneur en révélant la raison de son divorce qui laissera tout le monde perplexe et sans voix.Œuvre du metteur en scène, la scénographie fonctionnelle a dominance blanche, a consisté en un décor imposant qui a restitué les atmosphères glaciales d’une morgue toute en faïences, annoncée par une entrée en arcade qui s’ouvre sur une symétrie de tables funéraires, utilisées comme bancs ornés de grands éventails évoquant la Chine, qui s’ouvrent et se referment selon les différentes scènes. Les atmosphères créées par un éclairage, diversifié entre vif et feutré, latéral, facial ou vertical a bien servi le spectacle, tout comme la conception de la bande son, signée Mohamed Zami qui a pris le soin de plaider pour toutes les femmes en Algérie, en faisant voyager la thématique du spectacle à travers des compositions de qualité, conçues dans plusieurs styles musicaux de différentes régions du Pays. Très applaudis par le public, les comédiens ont excellé dans le rendu du spectacle « Sekoura », produit par le Théâtre régional de Souk Ahras. Le 14e Festival national du théâtre professionnel se poursuit jusqu’au 21 mars.