Le rapport de Benjamin Stora sur les questions mémorielles portant sur la colonisation et la guerre d’Algérie est au centre de larges débats dans les médias et parmi les spécialistes qui le trouvent particulièrement maigre et largement en deçà des attentes du peuple algérien.
L’évacuation dans ce rapport de la question de la repentance et de la présentation des excuses l’a vidé de son contenu et l’a rendu objet de toutes sortes de soupçons. Si le gouvernement algérien n’a pas encore réagi de façon officielle à ce rapport, attendant certainement pour le faire, la remise du rapport de Abdelmadjid Chikhi, chargé d’un travail en parallèle sur la question mémorielle, les citoyens algériens ont déjà dit leur mot. Pour eux, ce rapport n’a pas exploré toutes les impasses empêchant l’aplanissement véritable du passé colonial et fait de la question des harkis un point nodal de la réconciliation des mémoires.
Certes, il y’ a dans ce rapport la reconnaissance de ce passé colonial avec ces horribles conséquences, mais c’est une reconnaissance insuffisante car non validée par des excuses. Et l’Algérie a été claire dans ces exigences à ce sujet. Le travail de mémoire doit s’appuyer sur le triptyque, reconnaissance, excuses et réparation, et aucun élément de ce triptyque ne doit être éliminé au risque de remettre en cause tous les efforts consentis. Et c’est justement par-là que pèche le rapport de Benjamin Stora.
Comment en finir avec le passé colonial et les surenchères politiciennes et électoralistes qui l’entourent si on fait table rase d’excuses et de pardon ? Tout nouveau départ nécessite une réelle repentance. Et apparemment la France n’est pas prête à se repentir. Le peuple algérien a pris acte des gestes symboliques entrepris ces derniers mois dans le chemin de la réconciliation des mémoires entre les deux pays, mais cela reste insuffisant tant que la France reste encore réticente sur certaines questions.
La restitution des crânes des résistants algériens, la déclassification des archives et la reconnaissance de la responsabilité française dans l’assassinat en 1957 d’Ali Boumendjel sont autant de pas positifs dans le long chemin de la réconciliation entre les deux pays, mais il doit être suivis et complétés par d’autres actes pour permettre aux deux pays de se tourner définitivement et de façon sereine vers un avenir commun.