Aujourd’hui, dans les médias, la mode est à l’info rapide, type fast-food informationnel, et les gens s’informent en temps réel ; or il n’y a pas que du bon dans cette transformation des médias traditionnels, au moment où la presse alternative est en train de prendre leur place. Le tirage baisse de manière significative, certains journaux disparaissent des écrans radars médias, d’autres tentent de se recycler dans la presse électronique ou dans l’audiovisuel, l’époque étant à l’avantage de l’image sur l’écrit, tendance dangereuse, mais induite par l’Internet depuis une vingtaine d’années avec tout ce que les réseaux sociaux charrient avec eux comme sédiments informationnels nocifs. La vulgarisation est transformée en vulgarité, la simplicité dans l’information devient simplisme dans la présentation et l’analyse, et, malheureusement, la généralisation de l’information de divertissement a mené à une globalisation de l’abêtissement, puisque la politique de Facebook obéit au règne du nombre et au pouvoir de la majorité.
Je vous donne deux exemples de ce que l’on peut lire aujourd’hui sur le dictionnaire soi-disant libre « Wikipédia » : l’homme d’Etat britannique Alfred Milner (1854-1925) et la chanteuse américaine Nicki Minaj. Le premier a été l’un des hommes les plus puissants de la planète ; c’était lui le concepteur de la déclaration Balfour et une des grands prophètes du colonialisme britannique en Afrique. Tout homme politique doit connaitre de plus près cet homme auquel Wikipédia ne consacre que huit lignes qui ne disent absolument rien et ne donne aucun renvoi, aucune référence sur sa biographie, préférant maintenir dans le secret cet homme qui été un des initiateurs de la société secrète la « Table Ronde » qui a travaillé depuis la seconde moitié du XIXe siècle à maintenir l’Afrique sous le joug des puissances coloniales. .
Pour Nicki Minaj, rappeuse exhibitionniste, Wikipédia consacre dix pages et plus de 130 renvois et sources, créant une véritable encyclopédie à cette chanteuse.
Ce choix n’est pas fortuit et obéi à une logique marchande pure. Wikipédia qui dit être un projet d’encyclopédie collective en ligne, universelle et multilingue cache l’essentiel derrière sa façade accueillante : derrière sa mondialisation de l’information il existe un mondialisme ; c’est-à-dire qu’une idéologie se cache derrière la bienveillance et l’accessibilité de l’information donnée.
Cette parenthèse est nécessaire pour comprendre ce qui se passe sur les réseaux et ce qui pousse à une transformation rapide de la presse traditionnelle en fast-food média. L’Algérie, qui ne possède pas une longue tradition dans la presse, subit les contrecoups de ces transformations de plein fouet.
Un des autres dangers de la « presse parallèle » reste son caractère illisible et invisible, sa non traçabilité, en permettant de s’appuyer sur ce sentiment d’être incontrôlable et ne pas se conformer aux normes et aux règles selon les standards internationaux. Un type de presse calquée sur les Anonymous, mais à visage découvert, et qui se situe entre les justiciers de bande dessinés et les Don Quichotte des temps modernes, avec tout ce que ce type de média implique en matière de manipulation, de noyautage et de piraterie informatique.
C’est une presse nouvelle, certes, une autre manière de voir, certainement, mais les dangers que l’on observe déjà, et que cette presse des réseaux sociaux induira encore en menant à terme la mise à mort de la presse traditionnelle, ne sont encore que la partie visible du mensonge.