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Tiklat, l’antique Tubusuptu :des vestiges à valoriser

L’antique Tubsuptu était une cité commerciale florissante dans les premiers siècles de l’ère chrétienne. En témoignent, sa participation en 411 AP. J.C au Concile chrétien de Carthage qui a regroupé tous les représentants des Églises chrétiennes (catholiques et donatistes) de l’Afrique et les amphores à l’huile d’olive provenant de cette ville, retrouvées dans plusieurs pays méditerranéens et même au Soudan.

Située à quelque 28 kilomètres de Béjaïa et à 3 kilomètres d’El‐Kseur, Tubusuptu est fondée en 27 avant l’ère chrétienne par l’empereur romain Auguste Octave, fils adoptif de Jules César. Elle était destinée à accueillir des vétérans romains, notamment ceux de la VII e légion, célèbre par sa fidélité à Rome et par ses exploits guerriers dans de nombreuses batailles, à l’exemple de celle d’Alésia livrée en 52 avant l’ère chrétienne qui a vu la défaite de la coalition gauloise et la reddition de son célèbre chef : Vercingétorix.

Bâtie sur la rive gauche de la Soummam (Nasava, à l’époque romaine), en partie sur une butte rocheuse appelée de nos jours «El Kifane» et en partie au bas de cette butte sur un terrain plat attenant au Nasava, la cité tendait ses tentacules sur une superficie estimée approximativement à plus de 30 hectares.

Construite à la même époque que onze autres colonies de vétérans dont Saldae (Béjaïa actuelle) et Rusazus (Azzeffoun actuel), sous le règne de Juba II, alors roi de la Maurétanie césarienne depuis l’an 25 avant l’ère chrétienne, Tubusuptu était l’une des grandes et importantes colonies romaines en Afrique avant d’être supplantée à partir de la fin du 1er siècle de l’ère chrétienne par Cuicul (l’actuelle Djemila), Timgad, Hippone et bien d’autres colonies plus prospères et plus puissantes.

Les vestiges encore existants de cette ancienne cité bien que maigres sont assez imposants pour faire entrevoir l’importance et la magnificence de cette ville. Les portions de remparts, les édifices funéraires, l’aqueduc, les citernes, les thermes et une mosaïque encore bien conservés que les visiteurs peuvent admirer encore aujourd’hui témoignent du passé glorieux de cette cité qui était encore debout au début du premier millénaire.

«Hisn Tiklat est une place forte située sur une hauteur qui domine les bords de la rivière de Béjaïa; c’est un lieu de marché. On y trouve des fruits ainsi que de la viande en abondance. Hisn Tiklat renferme plusieurs beaux édifices, des jardins et des vergers appartenant en majeure partie à Yahia ben el Ghadir», c’est ainsi que l’explorateur et géographe Al Idrissi a décrit la ville dans son ouvrage de cartographie médiévale écrit à partir de 1138.

LE FOUGUEUX TACFARINAS…

Tubusuptu a vécu dès le début de l’ère chrétienne au rythme des soulèvements organisés par des chefs locaux excédés par les exactions des Romains et de leurs auxiliaires.

En l’an 17 de l’ère chrétienne, c’est le fougueux Tacfarinas, l’enfant de l’actuel Souk‐Ahras, qui va mener durant sept ans une guerre totale contre la présence romaine en Afrique. Il portera partout la révolte, jusqu’en Tunisie. Il s’attaqua à la ville de Tubusuptu mais il n’a pas réussi à s’en emparer.

En 370 de l’ère chrétienne, c’est un autre chef local, le célèbre Firmus, qui va conduire dans ce qui fut alors la Maurétanie césarienne une insurrection qui durera trois années contre la présence romaine. Il s’en prendra lui aussi à la cité tubusuptienne et parviendra à s’en emparer mais pour peu de temps. Les Romains vont finir par la récupérer et mettre fin à la révolte de Firmus.

Avec l’arrivée des Vandales en Afrique à partir de 429 de l’ère chrétienne, tout en changeant de maître, Tubusuptu gardera son statut et devient l’une des villes les plus importantes du royaume vandales et des Alains, fondé par Genséric.

Après la parenthèse byzantine à partir de 533 de l’ère chrétienne, et à partir de l’an 700, la cité reviendra aux Kotamas qui se sont, entretemps, convertis à l’islam.

Dans les guerres dynastiques qui ont rythmé l’Afrique du Nord de l’an 700 jusqu’à la domination ottomane à partir de 1518, Tubusuptu perd de son prestige et commence à dépérir. Le fait qu’un des rejetons des Almohades, le Abdelwâdide Abou Tachfin, ait décidé en 1327 de fonder une ville‐citadelle qu’il dénomme Timzizdekt, jusqu’à côté de Tubusuptu, montre que la cité était déjà à cette date en ruines.

Aujourd’hui, les vestiges qui restent de cette antique cité, dans leur ensemble, que ce soit ceux de la cité‐elle‐même, ou ceux des deux aqueducs alimentant depuis les deux rives de la Soummam la cité ou des citernes surplombant la ville, appelées par les habitants de la région les citernes d’El Ariouia, tous ces vestiges méritent qu’on y prenne soin, qu’on les préserve et qu’on les valorise.

ETYMOLOGIE DE TIKLAT :

Tiklat, nom que va prendre Tubusuptu au Moyen Age, vient selon certains, qui n’avancent aucun argument linguistique valable, du mot berbère «El Qalâa». Comment «Tiklat» peut‐il dériver «d’El Qalâa», c’est improbable ! Si c’est un singulier, la question ne se pose pas, on aurait tout bonnement utilisé le mot «El Qalâa» ou Taqli3t, comme c’est le cas dans plusieurs régions d’Algérie, si c’est un pluriel, il dériverait plutôt de «Taklit» qui veut dire en kabyle esclave ou servante.

C’est d’ailleurs pour cette dernière hypothèse que penchent certains en arguant que les habitants de la cité avaient l’habitude d’employer des esclaves.

Hormis ces deux hypothèses qu’on retrouve dans la majorité des écrits et des interventions des archéologues et des acteurs associatifs, aucune autre hypothèse n’est avancée pour expliquer ce nom donné à Tubusuptu à partir du 8 e siècle

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