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Système scolaire: La Cour des comptes pose le diagnostic

Pour la première fois, la Cour des comptes s’est aventurée sur un terrain inattendu, celui de la qualité de l’éducation en Algérie.

Dans son rapport annuel 2024, publié ce dimanche et accessible sur son site officiel, l’institution s’éloigne de sa traditionnelle analyse des investissements financiers pour scruter les failles et les défis d’un système éducatif prioritaire, mais en panne d’efficacité.

Une radiographie inédite, qui met en lumière des dysfonctionnements pédagogiques, administratifs et structurels.

Depuis 2003, l’État algérien accorde une priorité stratégique à l’éducation, avec des réformes de programmes à tous les niveaux et des investissements colossaux pour développer les infrastructures scolaires. Mais le constat de la Cour des comptes est sans appel, malgré ces efforts, « le rendement du système scolaire algérien est parmi les plus bas au monde ».

L’un des points noirs est l’organisation du temps scolaire. Avec une durée effective de 32 semaines par an (contre une moyenne mondiale de 36 à 38 semaines), l’Algérie reste en deçà des standards internationaux.

Cette insuffisance, couplée à une pédagogie axée sur la mémorisation au détriment des compétences, limite l’acquisition des fondamentaux, notamment en langues et en mathématiques.

Les premières générations d’élèves ayant suivi la réforme éducative de 2003, évaluées lors des conférences nationales de 2014 et 2015, ont révélé des résultats préoccupants. Les performances aux examens nationaux, comme le Brevet d’enseignement moyen (BEM), montrent une nette prédominance des matières littéraires, tandis que les disciplines scientifiques et technologiques stagnent à des niveaux alarmants.

En 2016, les filières scientifiques représentaient une part marginale de l’enseignement secondaire : à peine 3,46 % pour les mathématiques et 15,80 % pour l’enseignement technologique. Ces chiffres sont loin des standards internationaux, où la technologie et les sciences attirent jusqu’à 30 % des élèves.

L’éducation scientifique et technologique, censée développer des aptitudes comme l’analyse, la synthèse et la critique, se résume à des savoirs cloisonnés, dispensés dans un cadre archaïque.

En mathématiques, par exemple, les élèves peinent à résoudre des problèmes nécessitant une intégration des connaissances. La faiblesse du dispositif didactique, tant pour les enseignants que pour les élèves, perpétue des pratiques pédagogiques désuètes. Résultat : un recul inquiétant de l’intérêt pour les filières scientifiques, alimenté par une inadéquation criante entre le contenu des cours et les attentes du monde moderne.

PRÉSCOLAIRE ET INÉGALITÉS

Si le préscolaire est reconnu comme un levier clé de réussite scolaire, sa généralisation reste un mirage. En 2015, seuls 50 % des enfants étaient concernés, et malgré une ambition affichée d’atteindre une couverture totale en 2018, le taux plafonne aujourd’hui à 59 % dans les structures publiques.

Cette situation accentue les inégalités et favorise l’émergence d’une école « à deux vitesses », où les élèves ne débutent pas leur scolarité avec les mêmes chances.

LE FLÉAU DES COURS PARTICULIERS

Autre point épineux, l’explosion des cours particuliers. Selon une étude universitaire, en 2013/2014, près de 67 % des élèves de terminale suivaient des cours privés, particulièrement en langues et mathématiques.

Ce phénomène, symptomatique de la perte de confiance des parents envers l’école publique, exacerbe les inégalités sociales et prive les élèves de temps de repos.

Pourtant, le ministère de l’Éducation nationale n’a engagé aucune étude approfondie pour en analyser les causes et les conséquences.

LA COUR DES COMPTES IDENTIFIE 3 DÉFIS MAJEURS POUR REDRESSER LE SYSTÈME ÉDUCATIF ALGÉRIEN :

1. La refonte pédagogique, pour passer d’un enseignement basé sur la mémorisation à une approche axée sur les compétences.

2. La bonne gouvernance, en renforçant la transparence et la gestion des ressources.

3. La professionnalisation des enseignants, à travers une formation adaptée et continue.

Ces priorités sont inscrites dans le plan stratégique 2021‐2024 et dans le cadre stratégique « L’école algérienne et les enjeux de qua‐ lité 2015‐2030 ». Mais les résultats tardent à se concrétiser.

Dans le cadre des Objectifs de développement durable (ODD), l’Algérie s’est engagée à garantir, d’ici 2030, un enseignement primaire et secondaire gratuit, équitable et de qualité pour tous.

Pour suivre cet engagement, la Cour des comptes a participé à une mission collaborative avec six autres pays arabes. Les conclusions, attendues, pourraient servir de boussole pour une réforme plus ambitieuse.

Le rapport 2024 de la Cour des comptes, qui formule 36 recommandations, met en lumière les échecs et les défis colossaux du système éducatif algérien. Mais il ouvre aussi une porte vers l’espoir : celui d’une école capable, à terme, de se hisser aux standards internationaux grâce à des réformes profondes, ambitieuses et inclusives.

L’éducation, pilier du développement durable, ne peut plus attendre. Le temps presse, et les générations futures ne peuvent se permettre de payer le prix de l’immobilisme.

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