Pour ceux qui ne le connaissent pas, le Fonds national d’investissements (FNI), est l’organisme étatique algérien qui a racheté en 2022 la totalité des actions de Veon au sein de l’opérateur de téléphonie mobile Djezzy, et, plus spécifiquement, le bras de l’État algérien dans les grands projets publics d’investissements.
On se rappelle la bataille judiciaire et financière des années 2010 entre l’État algérien et le magnat égyptien de la téléphonie mobile Naguib Sawiris autour de la vente de Djezzy, lorsque le ministère des Finances avait fait prévaloir les droits de préemption de l’État sur cet opérateur.
En fait, toute la procédure judiciaire et financière, procédurière également, a été effectuée par le FNI, qui reste, malgré ses différentes ‘’vies’’ et ses soixante années d’existence, l’outil financier de choix de l’État algérien dans la promotion et le soutien des investissements. Kamel Mansouri, le directeur général du Fonds, explique, dans un entretien à ‘’La Patrie News’’ que ‘’nos investissements s’alignent sur les priorités de l’État’’.
Mais, qui est vraiment le FNI ?
L’actuelle appellation du Fond national d’investissement est récente, mais l’histoire de l’institution remonte au 7 mai 1963, date à laquelle a été créée la Caisse algérienne de développement (CAD).
Celle-ci a été transformée ensuite en Banque algérienne de développement (BAD), puis en BADFNI. En 2009, l’appellation de Fonds national d’investissement (FNI) a été définitivement adoptée.
Et, en plus de 60 années de bons et loyaux services, les missions du Fonds n’ont pas vraiment changé et sont restées ‘’centrées sur l’accompagnement des investissements structurants, ayant un impact sur l’économie nationale’’, souligne Kamel Mansouri.
En fait, il tient d’emblée à préciser que ‘’tous les secteurs susceptibles d’avoir un impact socio-économique, quelle que soit la région, sont prioritaires pour nous. Nous visons la création d’emplois, le développement durable et la rentabilité, garantissant ainsi la pérennité de nos projets.’’
Pour autant, a-t-il dit, ‘’je tiens à préciser que les missions du FNI ne se limitent pas à l’investissement. Nous avons deux autres volets majeurs’’, à savoir la gestion, pour le compte du Trésor public, de tous les financements accordés aux entreprises économiques publiques ; et il est également et en même temps ‘’comptable signataire de l’État dans la gestion des financements d’équipements publics’’.
C’est ainsi que le FNI prend en charge, de par ses missions, la gestion financière d’un projet comme une autoroute ou un barrage.
Grosso modo, il gère, explique M. Mansouri, ‘’les prêts du Trésor public, la gestion des équipements publics et les financements de projets par ses ressources propres.’’
D’où proviennent les ressources financières du Fonds ?
Ces ressources, indique-t-il, ‘’proviennent principalement de sa dotation en capital, actuellement fixée à 150 milliards de dinars et qui atteindra 275 milliards de dinars dès le 2 janvier 2025. Le FNI peut également recourir à la dette pour augmenter ses ressources.’’ Il citera ainsi l’exemple de l’acquisition de 51 % du capital de Djezzy en 2014-2015, lorsque le Fonds a contracté un emprunt obligataire (auprès des banques primaires de la place, NDLR) de 160 milliards de dinars.
’’ LES DÉTAILS DU RACHAT DE DJEZZY ‘’
À ce jour, nous détenons un portefeuille de 21 participations au capital et une dizaine de crédits à long terme accordés à des opérateurs économiques’’, précise-t-il.
Dans le secteur automobile, le FNI est un acteur majeur, car ‘’il est prêt à financer tous les projets présentant un intérêt économique et social, qu’il s’agisse de création d’emplois, de désenclavement de régions ou qui confèrent une valeur ajoutée à l’environnement.’’ Il citera ainsi le projet Fiat ainsi que le complexe sidérurgique de Bellara qui bénéficient des financements.
Il dira à ce propos : ‘’quant à l’usine Fiat Djazair, elle accompagne la stratégie nationale de relance de l’industrie automobile.’’
En réalité, relève le DG du FNI, le Fonds ‘’joue un rôle actif dans la promotion de l’innovation, notamment à travers l’opérateur Djezzy, que nous incitons à développer au maximum les nouvelles technologies. Nous avons également des participations dans deux ou trois entreprises spécialisées dans ce domaine. De plus, nous gérons les fonds d’investissement des 58 wilayas, qui financent des entreprises locales. Les projets liés aux nouvelles technologies sont parmi nos priorités.’’
S’agissant en particulier de Djezzy et la téléphonie mobile, M. Mansouri a expliqué qu’à l’origine, ‘’le FNI détenait 51 % des actions de Djezzy. Lorsque notre partenaire étranger Veon a voulu céder ses parts en 2021, nous avons décidé de les racheter. Aujourd’hui, nous détenons 96,57 % du capital. Ce choix ne visait pas seulement à conserver l’entreprise dans le giron de l’État, mais répondait à une urgence de l’époque’’.
C’est le 1er juillet 2022 que le FNI avait annoncé officiellement l’acquisition de la totalité des actions détenues par le groupe Veon dans l’opérateur mobile Djezzy. Si le montant de cette transaction n’avait pas été communiqué lors de l’annonce, il a été révélé dans le Projet de loi de finances (PLF) pour 2025, un peu plus de deux ans après.
Le document budgétaire précise en effet que la somme investie par le FNI pour le rachat des 45,57 % de parts de Veon s’élève à 102 milliards de dinars, une dotation accordée par le Trésor public au FNI en 2022. Cette opération permet au FNI de renforcer sa position dominante dans Djezzy, détenant désormais 96,57 % du capital de l’opérateur.
Ce rachat complète une première prise de contrôle réalisée en 2014, lorsque l’État algérien avait acquis 51 % des parts de Djezzy pour 2,6 milliards de dollars.
Le DG du Fonds annonce ainsi que ‘’nous envisageons désormais de céder une partie du capital de Djezzy à travers la Bourse d’Alger. Cette ouverture, prévue pour le premier semestre 2025, concerne, dans une première étape, 30 % du capital et ciblera à la fois des institutions et le grand public.’’
D’autre part, signalons que la loi de finances 2005 prévoit de renforcer les capacités financières du FNI en augmentant son capital social.
Actuellement fixé à 150 milliards de dinars, conformément à l’ordonnance n°09-01 du 22 juillet 2009, ce montant devrait être porté à 275 milliards de dinars, soit une augmentation de 125 milliards de dinars, comme indiqué précédemment.
Cette augmentation de capital vise à doter le FNI de moyens financiers supplémentaires pour accomplir ses missions stratégiques. Le gouvernement explique dans l’exposé des motifs que cette mesure permettra au FNI de renforcer sa visibilité sur le marché, d’attirer davantage l’attention des investisseurs et d’améliorer la confiance des partenaires, qu’ils soient déjà engagés ou potentiels.
En consolidant sa structure financière, le FNI pourra également accroître sa solidité et sa solvabilité, des éléments essentiels pour soutenir sa croissance future.
Le FNI est également impliqué dans un méga-projet agricole, Baladna, avec des investisseurs qataris. Le patron du FNI dira à ce sujet : ‘’ Nous avons trois grands projets en cours, lancés au second semestre 2024. Le projet Baladna représente un investissement de 3,5 milliards de dollars et s’étale sur 117 000 hectares. C’est grandiose.
Nous mettrons en œuvre tous nos moyens pour réaliser un autre projet avec les Qataris. Il s’agit de la construction d’un hôpital de 300 lits à Sidi-Abdellah (dans la banlieue d’Alger, ndlr).
En outre, un projet agricole et agro-industriel est en cours aussi dans la wilaya de Timimoun, en partenariat avec des Italiens. Il vise l’exploitation de 36 000 hectares dans la production du blé, avec l’option de construction de trois unités de fabrication de pâtes alimentaires et du couscous.’’
Le projet Baladna de production de lait, en partenariat avec une entreprise qatarie, vise à répondre à la demande nationale en lait, actuellement importée, tout en valorisant les terres du sud du pays et en créant environ 7 000 emplois directs, explique encore M. Mansouri, qui, revenant sur le complexe sidérurgique de Bellara, précisera que ce complexe ‘’exploite des ressources naturelles locales et des produits de sidérurgie destinés à la consommation nationale ou à l’exportation’’.