Pour la première fois, une réunion du Comité de suivi de l’accord d’Alger de 2015 a eu lieu à Kidal, ville du Nord du Mali tenue par des ex‐rebelles indépendantistes. Un symbole qui témoigne de la difficulté à mettre en œuvre cet accord de paix, dans un pays où la majorité de la population le rejette par méconnaissance alors que les violences terroristes n’ont guère cessé.
Boubacar Salif Traoré, directeur d’Afriglob Conseil, expert en sécurité et développement dans le Sahel, estime que l’accord de paix signé en 2015 à l’issue du processus d’Alger n’a que très peu avancé. « En 2019, lors du dialogue national inclusif, la question de l’accord figurait parmi les points les plus importants. Une majorité de la population déclarait qu’il fallait une relecture de cet accord, parce que le point d’achoppement était le manque d’inclusivité. Beaucoup de Maliens ne se sentaient pas concernés par l’accord, cela a bloqué les choses. « Côté officiel, ils ont réussi à mettre en œuvre le Mécanisme Opérationnel de Coordination (MOC) qui est à la base de la future armée qui va se déployer dans cette zone, notamment des brigades mixtes entre l’armée malienne et les forces rebelles.
On s’attendait à ce que les choses aillent mieux dans la partie nord du Mali. Or on remarque que les groupes terroristes continuent à être actifs dans la zone. (…) tout ceci est un bon signe dans la mesure où on a pu permettre que cette première réunion puisse déboucher sur des actions concrètes.
Pour Boubacar Salif Traoré, « entre‐ temps, il a fallu discuter avec les différents acteurs. On a remarqué ces derniers temps des signes d’apaisement, même s’il y a quelquefois des tensions qui peuvent apparaître : par exemple la délimitation d’une zone de défense notamment dans certaines parties du nord qui avaient été déclarées par la CMA, d’où la réaction du gouvernement malien.
Avec l’entrée au gouvernement, au ministère de la Jeunesse et des Sports d’un cadre de la CMA, les choses ont commencé à s’apaiser. Il a fallu beaucoup de temps pour dialoguer. Le comité de suivi n’a pas arrêté le processus, malgré le coup d’Etat du 18 août 2020 [et la chute du président Ibrahim Boubacar Keïta, ndlr], il n’y a pas eu de rupture.
Ce dialogue a continué et porte ses fruits aujourd’hui. « Quand les membres de la transition ont pris le pouvoir, ils ont tout de suite tenu à montrer qu’ils étaient pour la mise en œuvre de l’accord.
Un ministère de la Réconciliation nationale a été créé et il a immédiatement fourni un tableau de mise en œuvre progressive de différentes dispositions de l’accord.
Cela a été un premier signal fort pour montrer à l’ensemble de la population malienne que le pouvoir de transition s’inscrivait dans cette logique. Il ne faut pas oublier l’action de la communauté internationale présente au Mali, partante pour cette mise en œuvre de l’accord. Le pouvoir de transition s’inscrit dans ce processus ».