Les premiers éléments dévoilés de la loi des finances complémentaire pour l’année en cours confirment une dégradation pour 2022 du déficit public par rapport aux prévisions, en raison des dépenses supplémentaires imposées par la conjoncture doublement compliquée sur le plan interne et externe.
En termes de chiffres, le déficit budgétaire prévu atteindra la barre des 3310 milliards de dinars soit, 24.82 milliards de dollars. Pour leur part, les dépenses budgétaires excèdent les 8642 milliards de dinars, soit 64,78 milliards de dollars, dont 5664 milliards de dollars de budget de fonctionnement, 42,46 milliards de dollars, et un budget d’équipements de 2978 milliards de dinars, 22,33 milliards de dollars.
Parallèlement, les prévisions tablent sur des recettes budgétaires d’un montant plafonné à 5331 milliards de dinars, 39,97 milliards de dollars, dont14,45 milliards de dollars de taxe sur les revenus pétroliers, et 25,52 milliards de dollars, de taxes ordinaires.
Ces prévisions font ressortir un déficit budgétaire estimé à -3310 milliards de dinars, soit l’équivalent de 24,82 milliards de dollars, ce qui dépasse le niveau les recettes pétrolières, et un déficit de trésorerie d’environ -4140 milliards de dinars, soit l’équivalent de 31,04 milliards de dollars.
Les besoins de financement se situeraient ainsi à 3954 milliards de dinars, 29,64 milliards de dollars au moment où la taxe sur le revenu pétrolier ne couvre que moins de 35% de budget de fonctionnement, qui représente essentiellement la masse salariale.
Incontestablement, ce déficit budgétaire impose des cures d’austérité qui affectent profondément beaucoup de citoyens, au-delà de la détérioration des situations individuelles, toute politique de rigueur s’avère récessive et freine les mouvements de reprise économique, notamment en cette période politique particulièrement instable.
Alors que reste-t-il à l’état comme marge de manœuvre pour combler ce déficit ?. Car quoi qu’il en soit, les pouvoirs publics sont condamnés à trouver une autre parade que la possibilité d’opérer une ponction sur la caisse de régulation les recettes dont les ressources restent insuffisantes avec seulement 526,8 milliards de dinars. Par ailleurs, la dette publique qui a atteint les niveaux importants, soit 9335 milliards de dinars près de 70 milliards de dollars, en 2020 ; soit plus de 45% de produit intérieur brut (155,5 milliards de dollars), en sus des problèmes de liquidité dont souffrent les banques ne permettent pas d’envisager le recours à l’endettement intérieur.
Concernant l’endettement extérieur, il reste qu’en plus de la marge de manœuvre très limitée au vu des dettes publiques estimées à seulement 1,2 milliard de dollars, les mécanismes de prêt ne sont pas disponibles à des niveaux élevés même dans le cas les banques de développement, ce qui a été le cas avec le banque africaine de développement, qui a fourni 900 millions d’euros fin 2016.
Autant dire que le contexte actuel ne présage point de rassurant et appel à un renforcement d’une ampleur exceptionnelle des moyens de gouvernance car en réalité, avec des déficits et de la dette notre pays risque de voir sa souveraineté se limiter irréversiblement.
Dans la pratique, le déficit provient de deux causes qui s’additionnent : le déficit primaire, la différence entre les dépenses et les recettes courantes, et la somme des intérêts versés sur la dette, le service de la dette. Le déficit primaire dépend des choix politiques et du taux de croissance de l’économie.
Sans entrer dans des considérations trop techniques, il existe une relation algébrique entre le déficit primaire, le taux de croissance de l’économie, le taux d’intérêt et l’évolution de la dette. Par exemple, avec un taux de croissance réel de 2 %, un taux d’intérêt nominal de 4 %, une inflation de 2 %, un déficit de 2,4 % du PIB permet de stabiliser la dette à 60 % du PIB.
Et attendu que le recours à la planche à billet s’est avéré être plus nocif à notre économie et aux grands équilibres financiers que profitable en terme de bonne gouvernance, reste, comme seul palliatif à notre pays, de composer avec les effets probables d’une éventuelle dette publique sur la situation monétaire globale de notre pays dans le cas d’un recours à l’emprunt, externe. Encore qu’il faudrait-il pour cela que la situation politique retourne à la normale afin que les institutions financières puissent répondre favorablement à d’éventuelles demandes de crédits pour redresser la situation économique qui risque d’exploser d’ici 2022.