Malgré tous ses travers et ses curiosités, la presse est ce qui reste à l’Etat quand tout est hostilité et périls multiformes. Comme on le vit aujourd’hui. La presse, quand elle est libre et honnête, aide par ses éclairages et ses rapports circonstanciés à éclairer l’esprit du décideur pour mettre le doigt sur la plaie. Un naufrage général de la presse, par contre, entraine dans son sillage un chaos dont il est difficile de se relever.
Le vide laissé par la presse au lendemain de la chute de la Planète Bouteflika, et le discrédit dont elle a été cible malgré elle, pointée du doigt autant par les pouvoirs publics que par le hirak, a laissé les espaces libres pour les parajournalistes, qui, dès lors se sont concentré sur les réseaux sociaux pour livrer à l’opinion publique une information en continue, et qui n’avait ni la compétence ni la qualité de l’information. Mais elle avait la performance et l’influence de faire pencher l’opinion à gauche ou à droite.
Les pasticheurs virtuels de la presse, dans sa version Facebook, YouTube et Tic-Tok ont littéralement soufflé la crédibilité de l’information. Certains ont essayé honnêtement de livrer une information sérieuse, mais la quasi-totalité, composée de jeunes garçons et filles, à peine sortis de l’enfance, se sont exercé à un style dont ils ne possédaient ni les aptitudes ni les outils. Le massacre a été à la démesure de ses armées de parajournalistes qui ont pollué les espaces virtuels qui devaient servir à informer et s’informer. Tout le monde était en droit de s’autoproclamer journaliste et de balancer les informations, même les plus farfelues, sans aucune frontière, sans retenue, et de ce fait, sans vérification du contenu ni évaluation des dégâts qu’elles pouvaient occasionner, tant au plan moral, éthique, que social et politique.
Lorsque les autorités ont pris conscience de l’ampleur des dégâts il était presque trop tard pour corriger quoi que ce fût. Ce qu’il y a lieu de faire aujourd’hui, c’est de revenir aux standards, de redonner vie à des médias aphones et sans voix, à des journalistes qui ont du chemin à faire mais qui empruntent au moins des chemins connus.
Il y a de toute évidence, un « assainissement » à opérer dans l’urgence, tant la presse papier tout autant que les médias lourds se maintiennent depuis des années dans des postures très critiquables. L’émergence des médias lourds, dont une majorité a été construite sur les recettes publicitaires du journal papier, n’a fait qu’empirer les choses. Ces chaînes de télévisions ont appauvri le support papier sans ramener une plus-value à l’entreprise. Au final, aucune entreprise n’est aujourd’hui viable, ni financièrement ni au plan du journalisme pur, ni encore moins intellectuellement. Un naufrage général dont le cout social et politique peut aussi être onéreux…