L’œuvre de l’écrivain, anthropologue et linguiste, Mouloud Mammeri, disparu il y a 33 ans, est « un legs incommensurable », a considéré avant-hier l’universitaire, Hacène Hellouane, du département de la langue française de l’Université de Tizi-Ouzou.
La Bibliographie de Mouloud Mammeri « riche et diversifiée, témoigne de la grandeur intellectuelle de l’homme qui a accomplit en une seule vie un travail titanesque qui en demande plusieurs », souligne l’universitaire dans un bref entretien à l’APS à la veille de l’anniversaire du décès de l’écrivain, disparu la nuit du 25 au 26 février 1989 dans un accident de voiture à Ain Defla.
Rappelant ses différentes facettes de linguiste, anthropologue et d’homme de lettre, Hellouane a affirmé qu’en tant que linguiste, Mammeri a posé les fondements nécessaires à la préservation et au développement de la culture et de l’identité amazigh en comprenant, tôt, l’importance de l’écrit, qui a fait la grandeur de toutes les nations, pour parer au risque de disparition inéluctable qui les guettait.
« Il a, alors, entamé un travail de collecte et nous a offert la méthodologie en incitant à revenir sur ce qu’ont fait et dit les anciens, et qui constitue un réceptacle, et s’est employé à mettre en place les règles (lexique et grammaire) et à constituer un vocabulaire, qu’il était allé chercher dans les différents dialectes, pour concevoir son dictionnaire, l’Amawal », a souligné l’universitaire.
Mammeri a pu préserver d’énormes pans de l’histoire
Ce travail, non seulement a permis de préserver d’énormes pans de notre Histoire et notre culture faite d’oralité, à travers la transcription de différents travaux constitue, également, aujourd’hui, poursuit Hellouane, la « base incontournable » de tous les travaux qui se font en cette langue.
En tant qu’homme de lettre, Mammeri, a intégré l’universalité sans jamais se départir de sa culture, fait-t-il remarquer, relevant qu’ »il était allé acquérir la culture de l’autre et est revenu développer la sienne avec ».
Ce cheminement choisi par Mammeri était motivé par 2 éléments principaux, « ses capacités intrinsèques et sa conscience de la nécessaire préservation et développement de sa culture, a-t-il dit.
Loin de se renfermer sur soi, Mammeri a été « un homme d’ouverture qui a su apporter sa part à l’édifice de l’humanité sans se renier où se départir de sa culture », a relevé M. Hellouane.
Illustrant son propos, l’universitaire souligne que son roman « la colline oubliée », qui « d’apparence décrit un village oublié et paisible est, en fait, le reflet de tous les bouleversements qui secouait le monde à l’époque ».
Aussi, ajoute-t-il, Mammeri, comme Kateb Yacine et d’autres écrivains de leur génération, « se servant de leurs savoir, se sont employés à faire vivre à travers leurs œuvres leurs langue et culture, brisant ainsi le cliché de la suprématie des cultures savantes sur les cultures vécues ».