Le chef de la diplomatie américaine Antony Blinken va parcourir plus de 3860 km, représentant le temps de vol entre Tel Aviv et Rabat, en passant par la Palestine occupée, où il rencontrera Mahmoud Abbas, et l’Algérie, dans son escale du 29 mars.
Ainsi, Israël, Cisjordanie, Algérie et Maroc, sont inscrits dans l’agenda du chef de la diplomatie américaine, du 26 au 30 mars, pour, selon Washington, « renforcer la sécurité régionale », mais aussi pour « intensifier les efforts » face à l’invasion russe en Ukraine, avait annoncé jeudi dernier, le département d’Etat.
De toute évidence, au cours de cette tournée, le secrétaire d’Etat évoquera « la guerre menée par le gouvernement russe en Ukraine, les activités déstabilisatrices de l’Iran » ainsi que « les accords de normalisation entre Israël (et certains pays arabes, ndlr), les relations entre Israéliens et Palestiniens, et la préservation de la possibilité d’une solution à deux Etats au confit israélo-palestinien », précise un communiqué.
Le Sahara occidental est exclue des échanges de Blinken, mais le dossier sahraoui s’imposera de lui-même, quand il aura mis les pieds à Alger, tant tout est intimement enchevêtré.
Blinken s’entretiendra d’abord avec le Premier ministre israélien Naftali Bennett, qui s’est proposé comme médiateur dans le conflit lancé par Moscou contre Kiev; puis il se réunira avec le président palestinien Mahmoud Abbas à Ramallah.
Au Maroc, Blinken rencontrera son homologue Nasser Bourita et d’autres responsables du gouvernement pour « échanger les points de vue sur les questions régionales et la coopération bilatérale, ainsi que sur la progression des droits humains et des libertés fondamentales ». Mais la visite du diplomate américain au Maroc permettra aussi de clarifier un certain nombre de positions, dont l’abstention du royaume lors du vote de l’ONU condamnant l’invasion russe en Ukraine. Cette position marocaine avait le double objectif de faire pression sur les pays d’Europe concernant le Sahara et sur les Etats Unis, afin de laisser entendre que les autorités marocaines ne toléreraient aucune inflexion des États-Unis sur la reconnaissance de la souveraineté marocaine sur le Sahara occidental.
Donc, la tournée de Blinken, qui se veut un rapprochement de Washington vers ces Etats, sera aussi une épreuve diplomatique pour les Américains pour attirer le plus d’acteurs majeurs dans ses rangs. Les résultats de la visite de Bliken seront donc intéressants à suivre.
Mais que pourrait Blinken dire ou proposer à Alger ? Tout d’abord, il faut bien préciser que l’étape la plus intéressante de la tournée de Bliken sera Alger. Pourquoi ? Pour plusieurs raisons, dont la principale est ceci : autant Israël que le Maroc sont des alliés stratégiques de Washington, alors qu’Alger est considérée comme plutôt proche de Moscou, pour d’évidentes raisons historiques et stratégiques. De ce fait, c’est à Alger que Blinken devrait dérouler la rhétorique la plus imposante pour convaincre.
Il y a aussi à lier la visite au contexte international, marqué par la guerre en Ukraine et la crainte américaine de voir se propager la zone des hostilités à une échelle plus grande. Les Etats Unis ne veulent pas que la guerre persiste, mais cherchent à en sortir grandis et bénéficiaires.
Le gaz sera aussi une des questions d’actualité. Les Etats Unis cherchent à extraire les pays d’Europe de la dépendance russe, c’est clair. Mais comment ? Déjà, Zelensky, hier, demandait au Qatar d’élever la production de son gaz pour approvisionner les Européens. Blinken prendra le même chemin, mais certainement en demandant plus : le retour vers le gazoduc Maghreb-Europe suspendu récemment par Alger, après les actes d’hostilité affichés et non assumés par le Maroc.
Pourtant la grande question qui continue à empoisonner les pays du Maghreb demeure bel et bien le Sahara occidental, ex-colonie espagnole considérée comme un « territoire non autonome » par l’ONU, oppose depuis des décennies le Maroc au Front Polisario, avec tous les « effets nocifs » sur la région maghrébine.