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Naom Chomsky dévoile pour « L’Express » les dessous des cartes : « Voilà comment fonctionne réellement le monde… »

Quand Noam Chomsky parle, c’est toujours un événement. Professeur émérite de linguistique au Massachusetts Institute of Technology de 1955 à 2017. Mais surtout par ses écrits sur la politique et les médias qu’in est mondialement apprécié et écouté. Ecrivain et chercheur prolifique, Chomsky a publié de très nombreux livres et articles dans lesquels il fait part de ses analyses, notamment sur la politique étrangère des États-Unis et le fonctionnement des médias de masse. Il a été classé par fois par des revues spécialisées comme l’ « intellectuel le plus influent au monde ». En 1992, d’après l’Arts and Humanities Citation Index, Chomsky est plus souvent cité qu’aucun autre universitaire vivant pendant la période 1980–92. Il est considéré comme une figure intellectuelle majeure du monde contemporain, à la fois controversée et admiré. Dans l’entretien qui suit, il donne des éclairages majeurs sur la politique étrangère américaine, sur l’Iran, Israël, les « grenouillages » politico-sécuritaires dans la région maghrébine et dresse un tableau inquiet des médias sociaux

Professeur Naom Chomsky, une première question, un peu imprécise mais intéressante : qui dirige réellement le monde ?

On peut en disserter pendant des semaines … Moralement, personne ne dirige le monde, bien sûr, car il y a une grande disparité de pouvoirs dans le monde contemporain ; en fait, depuis la fin de la Seconde guerre mondiale, les Etats-Unis d’Amérique ont acquis une puissance globale ; ils ne dirigent pas tout, mais leur puissance est incroyable ; et c’est ce que nous voyons autour de nous à chaque minute. Prenons, par exemple, ce que l’on appelle « accord Abraham », qualifié par l’administration Trump d’« accord du siècle », c’est-à-dire l’accord israélo-palestinien. Cet accord est venu de Benjamin Netanyahu, et les Etats Unis l’ont présenté au monde … Demandez-vous simplement, ou supposez qu’un autre pays avait présenté cet accord, disons la Chine, l’Allemagne ou l’Inde… Y avait-il des personnes qui s’y seraient intéressé? Même s’ils manifestaient de l’intérêt ils l’auraient rejeté sans aucun doute, impudemment et simplement. Mais quand c’était les États-Unis d’Amérique qui lui ont apporté sa caution, il est devenu la base de toutes les discussions et toutes les politiques.

La réaction immédiate dans le monde à cette ridicule proposition a été, oui, nous devons l’accepter et nous devons vivre avec … Cela vous donne une partie de la réponse à votre question : Qui dirige le monde? Nous allons maintenant prendre un autre exemple, récent aussi. Les Nations Unies avaient imposé une série de sanctions contre l’Iran. De mon point de vue, ces sanctions n’étaient pas justifiées, mais malgré cela elles ont été approuvées. En tout cas, ces sanctions venaient de prendre fin. Que s’est-il passé plus tard ? Les États-Unis d’Amérique voulaient renouveler ces sanctions, et s’ils se sont donc adressés au Conseil de sécurité de l’Onu et ont demandé qu’un nouvel ensemble de sanctions soit imposé à l’Iran. Le Conseil de sécurité a rejeté cette demande, et aucun allié des États-Unis ne l’a accepté.

La demande de sanction a été rejetée à la quasi-unanimité. Le seul pays qui a voté en faveur des États-Unis a été la Colombie. Quant aux autres pays, ils ont tous refusé. Alors qu’ont fait les États-Unis à ce sujet ? Le secrétaire d’État Mike Pompeo est revenu au Conseil de sécurité et a déclaré: « Désolé, mais vous allez renouveler les sanctions contre l’Iran parce que nous le souhaitons ! ». De ce fait, le vote en faveur des sanctions a eu lieu ; l’Europe et le reste du monde ont renouvelé les sanctions anti-iraniennes, car il est risqué de provoquer la colère du père moral qui peut vous punir sévèrement. Si l’Europe ne se conforme pas à la décision, alors elle sera exclue du système financier international géré par les États-Unis. En fin de compte, l’Europe a cédé à la décision de renouveler les sanctions malgré sa grande opposition. Telle est l’autre réponse à la question : comment le monde fonctionne-t-il ? Je peux donner beaucoup d’autres exemples, mais cela clairement explique le phénomène.

La pandémie de la Covid-19 est-elle en train de reconstruire un nouvel ordre international comme l’a fait avant la peste noire de 1346 ?

Le virus Corona est très dangereux, mais à l’heure actuelle, la pandémie du coronavirus ressemble plus à l’épidémie de grippe du siècle dernier. Il est clair que la situation actuelle est aussi dangereuse que la grippe. Elle est au moins un peu similaire à la situation de l’époque, si elle n’est pas traitée correctement. Ensuite, elle pourrait atteindre le niveau de ce qu’on appelle la grippe espagnole au siècle dernier. La grippe espagnole a-t-elle changé le système mondial ? Dans une certaine mesure, cela a conduit à la défaite de l’Allemagne …en fait, ce furent les forces américaines qui sont entrées au milieu de la guerre qui avaient contracté et fait véhiculé le virus, elles n’étaient pas en bonne santé, ce qui a changé la nature de la guerre. Mais au-delà, le virus n’a eu qu’un effet minime ; en fait, après quelques années, vous l’avez complètement oublié. Je suis né dix années plus tard, en 1928. Je n’en ai jamais entendu parler. Bien sûr tous les membres de ma famille ont vécu cette épidémie, mais je ne l’ai pas su jusqu’à ce que je rentre à l’école. Donc l’épidémie de la fièvre n’a pas eu d’impact sur le système international.

Maintenant, pour le coronavirus, je pense qu’il aura un impact. Mais il y a de sérieuses questions qui se posent non pas à cause de la pandémie elle-même, mais à cause du contexte d’où elle est partie. Cette pandémie est survenue en raison de graves carences au niveau du système international ; et si ces défauts persistent, il y a lieu à s’attendre à pires pandémies qui surviendront dans le futur, peut-être même très bientôt. Mais si ces défauts sont corrigés, nous serons en mesure de contenir la menace imminente à l’avenir. Et cela a à voir avec la façon dont le monde conçoit l’ordre international. Est-ce en reconduisant le système néolibéral ou en détruisant ces programmes, et nous assisterons alors à un ordre mondial plus humain et plus harmonieux. C’est une question critique au plus haut niveau.

Quelles sont et seront les implications de la crise sanitaire actuelle sur l’économie mondiale néolibéraliste? L’Afrique et les pays arabes paieront-ils le prix de cette crise?

Ok, soulignons d’abord quelque chose qui mérite une attention particulière : la réponse des pays à la crise, et qui a énormément variée d’un pays à l’autre. Dans certains pays, il y a une crise grave, comme pour les États-Unis, le Brésil, l’Inde et d’autres pays ; d’autres pays ont agi très rapidement concernant les informations reçues de la Chine à la mi-janvier. Les informations sont arrivées alors et certains pays ont agi avec célérité maitrisant de ce fait les effets de la crise. Ainsi, parmi les pays dont la réaction a été à la fois rapide et efficace, les pays africains ;  les services de santé africains ont réagi très rapidement et ont pris les mesures appropriées. Résultats : en Afrique, il y a eu de bien meilleurs résultats qu’en Europe et incomparablement meilleurs que les résultats obtenus aux Etats-Unis. Ceci est véritablement digne d’intérêt.

Donc il y avait des moyens de gérer la crise en Afrique, en Asie de l’Est, en Océanie, en Australie et en Nouvelle-Zélande. Ceux-ci ont bien réagi et très raisonnablement. De même que la Chine elle-même. D’autres pays ne l’ont malheureusement pas fait, mais c’est la faute de leurs chefs et du travail social … Maintenant, l’Afrique et les pays arabes en paieront-ils le prix? Malheureusement, oui…

Certains pays arabes ont ce genre de chef prêt à mourir afin de préserver son siège, par l’oppression et la violence au sein de leurs sociétés, et cela signifie qu’ils en paieront le prix. L’Afrique est pauvre et n’a jamais pu se débarrasser complètement des effets du colonialisme, par le fait de violences européenne et américaine continues ; donc oui, elle va souffrir.

Mais prenons quelque chose de très précis. Je suppose que des vaccins ont été produits et sont devenus plus disponibles. Mais qui en profitera le premier ? Les Etats Unis. Et au sein de la population américaine, ce sera encore et toujours les riches qui en seront les premiers bénéficiaires ! Toutefois, il existe un consortium international appelé COVAX qui vise à combiner les efforts pour développer le vaccin et résoudre les problèmes de distribution afin de garantir que le vaccin atteigne ceux qui en ont besoin et pas seulement ceux qui peuvent le payer. Les Etats Unis se sont opposé à ce syndicat et refusé de participer aux efforts menés. C’est le seul pays qui a suivi ce chemin. A la réaction américaine avait répondu la réaction chinoise. Comme la Chine est la plus susceptible d’être à l’avant-garde du développement du vaccin, elle a promis qu’il sera disponible gratuitement pour les pays pauvres. Pensez-vous qu’ils respecteront leur promesse? Je ne sais pas. Mais ce sont là les principales réactions sur la scène internationale face au coronavirus.

Allons à l’Organisation mondiale de la santé. En Afrique, au Yémen et dans le reste des pays pauvres, les gens dépendent des services de l’Oms pour survivre à diverses maladies, voire à la malnutrition. Les États-Unis sont allés dans le sens de la destruction de l’Organisation mondiale de la santé, ce qui signifie que le nombre de personnes qui en souffriront sera innombrable en Afrique, au Yémen et en Amérique latine. Ceci est une autre réaction, et il y en a beaucoup d’autres. Ces problèmes doivent être affrontés et solutionnés.

De nombreux pseudo-intellectuels défendent le néolibéralisme en créant des pseudo-théories et des techniques et en les diffusant, utilisant les médias pour les rendre acceptables au niveau international. Quelle est la responsabilité des intellectuels pour dévoiler la vérité et pourfendre ces mensonges?

Eh bien, en fait, il existe deux types de responsabilité. La première est ce que les intellectuels ont fait tout au long de l’histoire pour soutenir l’autorité et lui servir d’outils de domination des peuples. C’est ce que nous pouvons déduire tout au long de l’histoire humaine. Bien sûr, heureusement, il y a le deuxième type de responsabilité. C’est dire la vérité et révéler les mensonges. Certains ont fait cela tout au long de l’histoire ; ils ont été maintenus à l’écart et ont été traités différentes façons. Comment ? Cela dépend de la nature de la société ; certaines sociétés les ont torturés ou envoyés en prison, tandis que d’autres sociétés les calomnient et les ignorent simplement. Elles les ont maintenus en marge et ne les ont jamais bien traitées. Ce sont là les deux responsabilités confiées aux intellectuels…

Maintenant et pour parler de néolibéralisme. Il y a un travail très dur que certains font pour éclairer le public sur la violation flagrante des droits de l’homme en découvrant ce qui s’est passé. Il n’y a pas de temps ici pour parler de ce sujet… Prenons juste les États-Unis comme exemple, le leader mondial et le leader du néolibéralisme sauvage dans le monde. Au début, le néolibéralisme a été déclaré efficace tout simplement. Un discours d’ouverture de Ronald Reagan disait ceci : « Le gouvernement est le cœur du problème ; les décisions doivent être prises en dehors du gouvernement qui répond quelque peu au peuple ». Les décisions ne disparaissent pas totalement mais sont plutôt transférées ailleurs, à une autorité privée, au secteur des grandes entreprises et à la classe des super-riches. Ces départements auxquels les décisions sont transférées sont complètement irresponsables envers le peuple. Vient ensuite la politique économique de base annoncée directement par les tenants du nouvel ordre libéral. Milton Friedman a écrit un article très important et influent dans lequel il a déclaré: «Le seule objectif des grandes entreprises est le fait de s’enrichir.» Rien d’autre que cela. Les grandes entreprises ne feront rien pour personne d’autre. Tout ce qu’ils font, c’est enrichir, et seulement l’enrichissement pour soi.

Pouvez-vous nous donner des exemples de ces intellectuels marginalisés comme vous?

Il existe un groupe appelé Institut de politique économique qui s’occupe de données et d’analyses précises de la situation économique de la population générale. Ses responsables continuent à produire des faits et des chiffres. Mais ils ne bénéficient pas de beaucoup d’attention dans les principaux médias. Ils continuent à faire ce qu’ils pensent être juste. Il y a aussi un groupe appelé The Public Citizen, fondé par Ralph Nieder. De même, il y a un certain nombre d’activistes qui essaient d’éclairer les gens sur ce qui se passe réellement. Et puis, il y a des gens comme moi qui parlent et livrent des éclairages. Nous parlons et écrivons constamment sur ce qui se passe. Mais toutes ces tentatives restent en marge des discussions. Dans une très large mesure, si l’une de ces tentatives se trouve être au centre des débats, alors il y aura certainement de grands mouvements opposés au néolibéralisme, car les choses prendront un caractère populaire, et de ce fait, cette brutalité néolibéraliste excessif ne continuera pas de l’être.

Que pensez-vous de l’utilisation abusive des mots, de la diffamation, pour propager la haine, conforter l’ignorance et  « fabriquer » des consentements au nom de la continuité du nouveau colonialisme?

Ce sont des questions pratiques, qui exigent des réponses pratiques. La réponse à la question éthique est bien sûr de ne pas tolérer les dérives sémantiques et informationnelles. Voyons les États-Unis, le gouvernement, les grands médias, les journaux, etc. la grande majorité des intellectuels propagent continuellement la haine et l’endoctrinement dans le but de faire approuver et accepter, par la force, l’idéologie dominante et les structures de pouvoir. On va donner des exemples clairs : la plus grande menace pour le monde est l’Iran ; c’est la plus grande menace pour la paix mondiale ; or c’est là une diffamation constante pratiquée contre ce pays. La Chine est l’autre menace pour la paix mondiale. Et c’est, là aussi, une diffamation constante pratiquée contre ce pays. Cuba est également considérée comme une menace pour la paix mondiale. Et nous nous trouvons, là aussi, devant une diffamation constante pratiquée contre Cuba pour alimenter la haine à son égard. En fait, il y a des choses qui doivent être critiquées dans ces pays ; des choses sérieuses. Donc des critiques sérieuses peuvent être imaginées. Mais y a-t-il besoin de cette forme de mobilisation? L’Iran est-il vraiment la plus grande menace pour la paix mondiale? Les partis démocrate et républicain, que ce soit dans l’administration Obama ou dans l’administration Trump, sont d’accord pour considérer que l’Iran est la plus grande menace pour la paix mondiale. Et il en est de même pour toute la classe intellectuelle. Où se trouve la menace iranienne la paix dans le monde? Il est probable que l’Iran travaille sur le développement d’armes nucléaires, c’est clair, mais demandons-nous, comment les intellectuels sérieux traitent-ils cette question ? Ils sont d’accord sur la question que l’Iran essaie de développer des armes nucléaires. Il n’y a aucune preuve de cela, mais disons que c’est correct. Alors, y a-t-il un moyen de régler la question? Oui, par la création d’une zone exempte d’armes nucléaires au Moyen-Orient, tout en veillant à ce que des inspections strictes soient effectuées ; cette mesure réussira très bien, compte tenu de l’expérience de l’accord conjoint qui a été annulé par l’administration Trump. Donc la création d’une zone exempte d’armes nucléaires, tout en étant soucieux de mener des inspections strictes mettra fin à la menace iranienne si elle possède des armes nucléaires.

Y a-t-il un problème à faire cela ? Les pays arabes ont appelé à plusieurs reprises pendant 25 ans à la création d’une zone démilitarisée nucléaire ; donc il n’existe pas de problème ici non plus. Et l’Iran ? L’Iran a toujours bien accueilli l’idée depuis de nombreuses années. Il n’y a donc pas de problème ici non plus. Qu’en est-il du monde du Sud ? Auparavant, le Mouvement des pays Non-Alignés comprenait 130 pays et il soutenait fortement l’idée. Qu’en est-il de l’Europe ? Elle a soutenu l’idée, elle aussi. Où est le problème? Le problème réside dans les États-Unis. Ceux-ci ont utilisé leur droit de veto contre le projet à chaque fois qu’il a été mis sur la table pour discussion. La dernière fois que l’idée a été soulevée, c’était à l’époque du président Obama et la question n’avait alors soulevé aucun intérêt particulier.

Pourquoi les États-Unis utilisent-ils leur droit de veto contre le projet de construction d’une zone démilitarisée au Moyen-Orient? Parce que les États-Unis ne veulent pas que les armes nucléaires d’Israël soient inspectées. En fait, les États-Unis ne le font pas officiellement et ne reconnaissent même pas qu’Israël possède des armes nucléaires. Bien sûr, les États-Unis savent qu’Israël possède des armes nucléaires, ce n’est un secret pour personne. Mais il ne reconnaîtra jamais cette évidence. Et il y a une raison derrière cela, qui est la loi américaine qui interdit de fournir une aide militaire et économique aux pays qui développent des armes nucléaires en dehors du champ d’application du TNP. La raison en est donc que cela pousse les États-Unis à imposer des sanctions inéquitables.

De nombreux pays arabes signent des accords de normalisation avec Israël, comment cela affectera-t-il l’avenir du conflit israélo-palestinien?

Comme je l’ai mentionné plus tôt… mais clarifions d’abord qu’il n’y a pas eu de paix. Vous avez raison d’appeler ces accords des accords de normalisation. En Occident, ils sont souvent appelés : accords de paix. Mais en fait, ils ne sont pas des accords de paix, puisqu’il n’y a pas eu de guerre, et par conséquent, il ne peut y avoir d’accords de paix. Ce qui a été signé récemment est en fait une évolution des accords précédemment signés, implicitement, du niveau fermé et officiel au niveau populaire. Il y a des accords implicites qui ont a été signé entre Israël et les monarchies familiales arabes pendant de nombreuses années, et ces accords comprennent divers arrangements et domaines. Maintenant la chose a été étalée au grand jour et livrée à la connaissance publique. C’est sans aucun doute un coup douloureux pour les Palestiniens. Le monde s’intéresse bien sûr à cet accord, car il faut comprendre pourquoi cet accord a été signé. L’administration Trump avait un plan géostratégique. Cela faisait partie des enjeux stratégiques en cours.

Le plan était de créer une alliance réactionnaire parmi les pays les plus réactionnaires et les plus brutaux du monde, et de les réunir sous le contrôle de la Maison Blanche. Dans le monde occidental, le Brésil est le premier pays à imiter Trump. En Asie du Sud, il y a l’Inde qui s’efforce de renverser la démocratie laïque indienne par la violation des droits de millions de musulmans et la destruction du Cachemire.

Récemment, de nombreux écrivains et chercheurs ont publié sur l’économie verte et bleue, essayant de nous convaincre de la possibilité d’humaniser le néolibéralisme. Est-il vraiment possible de rendre plus humain le néolibéralisme ?

Les politiques néolibérales nuisent gravement aux citoyens. Je vous ai déjà donné quelques exemples. Ces politiques visent à saper la démocratie, et elles réussissent très souvent à atteindre cet objectif. Le néolibéralisme conduit le monde au désastre en détruisant l’environnement. Si ses tenants continuent à le faire, alors la race humaine aboutira à avenir très sombre. Mais il n’y a aucune raison pour eux de continuer  à le faire. Les citoyens leur sont fortement opposés. Même le monde de l’entreprise découvre qu’il ne peut pas continuer dans leur politique, compte tenu des risques posés par l’opposition populaire en général ; les tenants du néolibéralisme essaient donc d’ajuster légèrement leur politique. Il existe de nombreuses façons de freiner les politiques néolibérales et nous disposons de moyens liés à la politique électorale, en développant des institutions alternatives. Donc oui, il faut aller de l’avant. Les désastres environnementaux sont le principal problème, et si nous n’agissons pas de manière décisive à leur sujet, tout le reste sera vain. Les nouvelles politiques conduisent à des ravages sur le terrain. Il faut donc mettre fin à ces politiques, et c’est possible. Les moyens sont disponibles. Il s’agit de faire pression, et il en va de même pour les autres problèmes.

Quelle est votre point de vue sur la nouvelle stratégie d’Israël au Moyen-Orient et en Afrique du Nord dans le cadre des accords de normalisation?

Ce n’est pas une nouvelle stratégie, c’est une ancienne stratégie. Israël a travaillé dur pour la mettre en œuvre tout au long de son histoire. Israël veut être le principal creuset de la puissance américaine dans la région du Moyen-Orient et de l’Afrique du Nord et avoir le soutien des régimes de la région, en particulier les dictatures du Golfe. Ceci s’ajoute aux politiques de normalisation qui poussent cette stratégie à faire un pas en avant.   

Quelle pourrait être la relation, si elle existe, entre le virus Covid-19 et le néolibéralisme?

Ce sont les deux faces d’une même médaille. En 2003, après la pandémie de SRAS, il était compréhensible pour les scientifiques que d’autres pandémies comme le virus corona étaient inévitables, et ils ont établi les normes qui devraient être prise pour empêcher toute autre pandémie. Mais comme je l’ai dit, la connaissance ne suffit pas. Il faut que quelqu’un agisse. Et les compagnies pharmaceutiques, diriez-vous ? Ils ont d’énormes ressources, de grands laboratoires, d’énormes profits, mais ils ne le peuvent pas, à cause de la logique du capitalisme qui est basé sur le travail pour le profit et non pour ce qui sauverait des vies ; et donc les ressources ne sont pas allouées pour faire face aux catastrophes… C’est le capitalisme, et il ne s’encombre pas des effets des catastrophes. Qu’en est-il du gouvernement ? Le gouvernement a également développé des laboratoires, des ressources diverses et des sources de financement, mais il n’est pas concerné par l’éradication du fléau à cause du capitalisme, qui considère le gouvernement comme un problème et non pas une solution. Le gouvernement n’est pas autorisé à intervenir. C’est une question épineuse et ouverte, grande ouverte. Mais ce sont là les piliers de la question. Si nous ne faisons rien pour changer ce système, la situation perdurera.

Quel est le rôle des médias sociaux dans la formation des consciences?

Les médias sociaux sont une arme à double tranchant. J’ai utilisé les médias sociaux pour organiser es activités, et pour promouvoir la discussion et le dialogue ; mais d’un autre côté, ces même médias sociaux ont aussi été utilisés pour répandre les mensonges et les rumeurs, et aussi pour consacrer la marginalisation. Les médias sociaux ont été utilisés pour contrôler les gens et leur faire vivre des illusions et les empêcher de discuter véritablement entre eux. C’est une histoire longue et compliquée. Il est difficile de dire des choses simples sur un sujet aussi compliqué…

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- Advertisement -L'express quotidien du 11/12/2024

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